Dans son livre intitulé « Vivre d’aventure », Mathieu Blanchard, un ultra-traileur âgé de 36 ans de la France, décrit peut-être la plus grande réalisation de son parcours. Il a remporté le légendaire Grand Raid de La Réunion le vendredi 18 octobre. Il a été le premier à franchir la ligne d’arrivée à Saint-Denis-la-Réunion, après 23h 25m d’effort excitant sur la « Diagonale des fous », un ultra-trail dur traversant tout l’île de La Réunion du Sud au Nord.
Pourtant, il n’est pas passé plus de deux mois depuis que personne ne pensait que cet athlète installé aux Deux-Alpes (Isère) brandirait le drapeau officiel du raid à la fin de la course de 175,3 km avec un dénivelé positif de plus de 10 000 m. Fin août, Mathieu Blanchard a été forcé de se retirer de l’Ultra-trail du Mont-Blanc (UTMB), qui est considéré comme le sommet de sa discipline et où il est monté au podium à deux reprises (3e en 2021 et 2e l’année qui suit), à cause d’une blessure à un tendon d’Achille. « La blessure a été récurrente pendant environ trois ans maintenant, elle est irrégulière. Parfois ça fait mal, et parfois j’ai des pics de douleur, comme l’UTMB cette année, » a dit Blanchard lors d’une conférence de presse avant le Grand Raid. Cependant, il est parvenu à terminer la Diagonale des fous sans douleurs, avec une avance d’une demi-heure sur Jean-Philippe Tschumi, un coureur suisse, qui a persisté avec lui pendant une grande partie de la course.
« Le seul fait de participer et de terminer la course était déjà un immense rêve réalisé, mais en sortir vainqueur était impensable », a confié Mathieu Blanchard à Réunion La 1ère, ses jambes toujours recouvertes de la terre réunionnaise suite à sa victoire. Il est rare de voir un premier participant exceller dans une course de cette ampleur. »
S’étant souvent dispersé en participant à plusieurs compétitions en une seule saison, Blanchard, qui a passé près d’une décennie au Canada, avait désigné le Grand Raid de la Réunion dans son agenda, résolu à découvrir cet ultra-trail, l’un des plus difficiles du circuit. Organisée en fin de saison, la course traverse les montagnes de l’île, comme le cirque de Mafate, avec leurs innombrables escaliers, et met les participants à rude épreuve. « Cette année, je suis plus engagé dans la Diagonale. Je veux livrer une belle performance et partager un moment spécial avec la communauté réunionnaise », avait-il déclaré fin août dans L’Équipe, admettant que l’UTMB n’était pas son principal objectif pour l’année.
Ses joues étaient marquées par la terre réunionnaise.
La veille de la course, Mathieu Blanchard, un athlète de la team Salomon, avait fait une déclaration préliminaire. C’était sa première participation et il voulait absolument finir la course tout en se familiarisant avec le terrain. Cependant, cela ne signifiait pas qu’il avait l’intention de prendre cela à la légère. Il resterait extrêmement compétitif.
Blanchard connaît bien les sentiers de la Réunion mais n’avait jamais participé à leur course la plus célèbre au paravent. En 2019, il s’était inscrit mais avait finalement abandonné quelques jours avant l’épreuve pour prendre part à l’émission Koh-Lanta aux Fidji. Cette expérience a engendré une certaine célébrité pour Blanchard, mais aussi le scepticisme de certains ultra-traileurs qui étaient déçus de voir une personnalité de télévision penchant pour les réseaux sociaux dans leurs montagnes.
Néanmoins, les prouesses répétées de cet originaire de Cavaillon (Vaucluse) lui ont rapidement valu une place parmi l’élite de l’ultra-trail. Il a terminé deuxième de l’UTMB 2022 en moins de vingt heures, juste derrière le prodige Catalan, Kilian Jornet. Blanchard, qui est professionnel depuis 2021, a décidé l’année précédente de modifier en profondeur sa façon d’aborder son sport. Installé désormais aux Deux-Alpes (auparavant à Montréal), il a limité ses déplacements et est devenu moins réceptif aux sollicitations multiples. Cette nouvelle approche s’est avérée bénéfique, comme en témoigne sa performance à la Diagonale des fous 2024.
» Cette année, je ne vais pas mettre l’accent sur la performance », prévenait le coureur français à la veille de la course. Marqué par son échec à l’UTMB et une préparation qui n’était pas tout à fait au point, il avait décidé de ne pas s’auto-imposer de pression excessive. Cependant, Mathieu Blanchard, étant un fervent compétiteur, admettait que «la veille de la Diagonale des Fous, je n’ai jamais été aussi sans douleur. » Il a remporté l’un des quatre monuments de l’ultra-trail le vendredi (y compris l’UTMB, la Hardrock 100 et la Western State, qui sont des courses américaines), malgré l’absence de certains des grands rivaux internationaux. A peine a-t-il franchi la ligne d’arrivée que Mathieu Blanchard a fêté en maculant ses joues avec la terre de la Réunion qu’il a parcourue pendant plus de vingt heures. « Regardez simplement mes jambes et mes chaussures, a-t-il déclaré avec un sourire. Cela a été une aventure gigantesque pour moi. »
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