Lisa Carrington n’est pas du genre à faire des démonstrations d’exultation ou à exprimer son excitation à l’issue des courses de kayak sprint. Le samedi 10 août, sur le calme plan d’eau du stade nautique à Vaires-sur-Marne (Seine-et-Marne), cette Néo-Zélandaise a simplement touché la coque de son kayak avec gratitude, à la manière d’un cavalier qui caresse le cou de son cheval, après avoir remporté la finale du 500m K1 (kayak monoplace).
Cependant, elle pourrait tout à fait exprimer son bonheur, compte tenu de ses réalisations lors des Jeux de Paris 2024. Confrontée à trois distances différentes dans les épreuves de kayak, elle a remporté successivement le 200m K1, le 500m K2, et donc le 500m K1 le samedi.
Sur les dix médailles d’or remportées par la Nouvelle-Zélande à l’approche de la finale des Jeux Olympiques, quatre étaient à mettre à l’actif du canoë-kayak : trois en kayak sprint avec Lisa Carrington, une dans le kayak cross avec Finn Butcher. « Un nouveau triplé d’or », a commenté le grand journal néo-zélandais, The New Zealand Herald, sur son site web, notant que « Madame Carrington » avait accompli à Vaires-sur-Marne ce qui s’était déjà révélé être un tour de force à Tokyo en 2021 : un triplé olympique. « Elle est un phénomène. »
En remportant six victoires à s’ajouter à celle obtenue en 2012 lors du 200m K1 à Londres et celle du 500m K1 à Rio en 2016, la native de Tauranga, située sur l’île du Nord, s’est jointe à l’élite des olympiens ayant remporté huit titres aux jeux d’été. Avant elle, seule une kayakiste, Birgit Fischer, originaire de l’Allemagne de l’Est puis de l’Allemagne réunifiée, avait accompli cet exploit.
L’athlète de 35 ans n’est cependant pas intéressée par ces références statistiques. Lisa Carrington, qui n’a pas brillé durant ses premiers championnats du monde junior, a décidé d’abandonner ses autres activités sportives, le netball – une variante du basketball – et le sauvetage côtier en surf. Depuis, toute son attention est portée sur le kayak, s’astreignant à un horaire d’entraînement rigoureux et un niveau de performance sans relâche. Lors de la finale du 500 m K1, elle a démontré des capacités tactiques et une vitesse remarquables, rattrapant le bateau hongrois en tête à la mi-course et gardant la tête jusqu’à l’arrivée.
Sa principale adversaire du jour, Tamara Csipes, médaillée d’argent, qui a fini plus d’une seconde derrière la Néo-Zélandaise, a commenté : « Elle va si vite ». C’était sur un plan d’eau aussi calme ce samedi qu’il était turbulent le jour précédent. Les conditions venteuses sont tellement habituelles que le site olympique a été surnommé Vent-sur-Marne.
La kayakiste française Vanina Paoletti ne tarit pas d’éloges sur la championne néo-zélandaise. Selon elle, Lisa se distingue dans le monde du pagayage par ses compétences techniques remarquables, qui surpassent celles des hommes et des femmes. Lisa a cette capacité étonnante de relâcher ses mains après chaque battement pour minimiser la tension sur ses avant-bras. Son étirement et positionnement de la main sont inégalables. Sa performance exceptionnelle qui consiste à gagner continuellement les courses laisse Vanina sans voix. Selon cette dernière, Lisa dépasse largement ses concurrents durant les phases de qualification, économisant ainsi son énergie pour les dernières étapes, contrairement à d’autres qui sont obligés de donner leur maximum dès le départ.
Lisa elle-même reconnaît que ce n’est pas aussi facile que ça en a l’air et que beaucoup d’efforts sont déployés lors des entraînements pour obtenir de tels résultats. Lisa Carrington est devenue la figure de proue de son sport en Nouvelle-Zélande, jusqu’alors dominé par le rugby, le cricket, la voile et l’aviron. Grâce à ses médailles d’or remportées à Londres et à Rio, le kayak est désormais plus populaire dans son pays natal. Cette information nous est livrée par Sarah Walker, membre néo-zélandaise du Comité international olympique (CIO) et ancienne championne de BMX.
Vanina Paoletti souligne également l’influence positive de Lisa sur l’équipe nationale. Elle gagne non seulement individuellement, mais aussi en double et en quatre places. Son talent exceptionnel a poussé la Nouvelle-Zélande à entraîner de jeunes femmes pour la rejoindre.
Elle est reconnue à travers le pays, mais garde une grande humilité, toujours en quête d’excellence et prête à démontrer ses compétences », déclare une déléguée du CIO, présente à son côté lors de la remise de sa dernière médaille d’or.
Son humilité enfouie et son dévouement pour sa famille et ses racines maories sont des traits que Lisa Carrington souligne régulièrement. Cependant, elle le fait toujours avec discrétion en public. Par contre, dans l’intimité de son embarcation, elle porte autour de son cou une pierre verte avec un motif tribal. Elle explique que cette pierre représente « les protecteurs de mon peuple », qu’elle respecte à travers ses nombreuses victoires.
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