La profession de charpentier a été transmise de génération en génération dans la famille Thomas, basée à Lavaur (Tarn) et ses environs. Le dernier héritier de cet héritage, Benjamin Thomas, a illuminé la piste en pin de Sibérie du vélodrome de Saint-Quentin-en-Yvelines, le jeudi 8 août, en perpétuant la tradition familiale. Comparé à la structure de Notre-Dame, son exploit olympique était constitué de quatre courses, quatre poutres minutieusement placées, le calcul précis et la part de chance nécessaire pour maintenir l’équilibre. En fin de compte, cela a abouti à une médaille d’or et l’hymne national français, qui a ému le fils de charpentier.
L’omnium est une compétition qui couronne le coureur le plus compétent et le plus rusé, qui doit enchaîner quatre courses en trois heures. Elle demande de la patience, de l’endurance, de la vitesse brute et de la récupération. Les performances de Benjamin Thomas lors de cette soirée suscitent plusieurs questions. Comment est-il possible d’analyser la course si calmement dans un environnement aussi étouffant que le vélodrome, qui dégouline de sueur ? Comment peut-on contenir ses attaques lorsque la foule rugit à chaque départ ? Comment ne pas se perdre dans les calculs alors qu’on tourne à 60 kilomètres par heure sur la piste ? Comment peut-on jeter un regard à l’écran géant qui pend au plafond du vélodrome, tout en maîtrisant la douleur qui tord les jambes et en naviguant entre les autres coureurs ?
Alors qu’il se relaxait à l’ombre d’un parasol en complétant des mots croisés, Benjamin Thomas passait son début d’après-midi, dans le jardin du château où résident les cyclistes français depuis le commencement des Jeux. Durant la matinée, il avait passé quarante-cinq minutes à faire du vélo avec Steven Henry, l’entraîneur de l’équipe nationale. Le cyclisme n’était pas au programme de leur conversation. Par la suite, en après-midi, Thomas s’est rendu au vélodrome comme s’il s’agissait simplement d’une autre session d’entrainement, du moins si on le croit. « À Tokyo [où il était favori, mais a fini quatrième], j’étais angoissé en me rendant au vélodrome. Cette fois-ci, je courais librement. C’était un sentiment de sérénité incroyable, » dit-il. Steven Henry a également ajouté, « il ne semblait pas du tout qu’il s’apprêtait à participer à un omnium. » « J’étais en mode pilote automatique ».
En suivant sa stratégie, il suit la deuxième voie : celle d’un schéma de chasse. Benjamin Thomas n’avait aucun intérêt pour la tête du classement jusqu’à la course aux points, une épreuve essentielle de l’omnium, difficile à comprendre pour les débutants, mais qu’il gère comme s’il s’agissait de l’alphabet. Dans cette épreuve, il est possible de renverser les positions de l’omnium, à condition de la débuter parmi les cinq ou six premiers compétiteurs. « A Tokyo, il était la proie, bien que cette race soit difficile à dominer. Mais cette fois, il avait l’intention de passer toute la journée en tant que chasseur », explique Steven Henry. Et qui voudrait être la cible de Benjamin Thomas quand il est aussi concentré ? « Il y avait d’autres concurrents très forts que je surveillais afin qu’ils ne prennent pas une avance excessive. J’ai laissé passer des jokers comme Fabio [Van den Bossche, troisième] ou Iuri [Leitao, deuxième] lors du tempo [la deuxième épreuve], cela m’a permis de faire moins d’efforts que les autres et d’avoir des concurrents devant moi qui gèrent la course aux points. Ensuite, je profite de ceux qui redémarrent et je marque des points dans les sprints pour mettre la pression sur les leaders ». Impressionnant.
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