De l’obélisque de Louxor en plein cœur de la place de la Concorde, spectateurs de tous âges observeront de jeunes athlètes, parfois à peine sortis de l’enfance, rivaliser pour l’or olympique et la gloire au travers d’une série de figures, de sauts, de roulades et, sans doute, de chutes douloureuses. La présence du skateboard comme une discipline olympique officielle, initiée lors des Jeux de Tokyo en 2021, figure parmi les points forts des Jeux de Paris 2024. Le Comité International Olympique voit cette initiative comme une méthode visant à renouveler son audience, un défi que beaucoup d’institutions traditionnelles tentent de relever. Ainsi, dès l’annonce de l’événement, les billets se sont vendus rapidement, garantissant un public plein pour les compétitions féminines le dimanche 28 juillet et masculines le lundi 29 juillet, ces dernières ayant été reportées à cause de la pluie.
Le skateboard, décrit par le skateur américain Jagger Eaton comme un « chaos organisé », a dû se discipliner quelque peu pour faire partie de la scène olympique. Cela a nécessité l’élaboration de règles strictes, qui contrastent avec l’esprit rebelle et contestataire qui caractérisait le skateboard des années 1960, lorsqu’il a été adopté par des jeunes turbulents de Californie jouant avec leurs planches et leurs roulettes. Cette réglementation a d’abord introduit une différenciation entre le street et le park, la première se passant dans un environnement urbain simulé avec des rampes, des escaliers et des bancs, et la deuxième se déroulant dans une cuvette remplie d’obstacles divers.
Au sujet des compétitions, les pratiquants de skate doivent effectuer des runs (tours) de quarante-cinq secondes et tenter cinq manœuvres acrobatiques (dans le cas de street skate). En ce qui concerne le système de notation, un panel de cinq juges évalue les performances des skateurs et attribue des scores sur un barème de 0 à 100. Les scores les plus bas et les plus hauts sont supprimés, et la moyenne des trois restants constitue le score final de l’athlète. Après le tour initial, seuls huit des vingt-deux skateurs restent en compétition pour la finale qui se déroule selon les mêmes critères.
Le terme « planchodrome urbain », à présent officialisé, représente le « skatepark » en anglais. L’influence profonde de la culture américaine sur le sport du skate se fait sentir, de la terminologie des manœuvres au design et à l’équipement du planchodrome urbain.
Dans un effort pour préserver l’identité française au milieu de cette culture étrangère prédominante, le ministère de la culture a publié dans le Journal officiel de la République française, sur les recommandations de la Commission d’enrichissement de la langue française, des traductions officielles sur quatre pages. Donc, le « skatepark » est appelé « planchodrome urbain (street) » ou « planchodrome à bols (park) ». Ainsi, certaines manœuvres acrobatiques ont également reçu de nouveaux noms : « trick » est devenu « figure », « grab » est devenu « saisie », « ollie » est maintenant « saut », « catch » est devenu « replaque », « flip » est maintenant « vrille », et ainsi de suite.
Skateboarding est une discipline sportive au cours de laquelle les accidents et les blessures sont communs. L’un des skateurs les plus reconnus des États-Unis, Nyjah Huston, a été légèrement blessé au genou lors d’un entraînement quelques jours avant les Jeux Olympiques de Paris 2024. « Le skateboard est imprévisible, une séance agréable et paisible peut rapidement tourner au vinaigre à cause d’un simple mouvement mal calculé, et tu te retrouves blessé juste avant une compétition. Mais c’est ça le skate, cela fait partie du jeu », a-t-il exprimé après avoir essayé le circuit de la Concorde.
Huston, un champion américain qui a remporté plusieurs X-Games (un événement essentiel dans le monde des sports de rue), souligne le risque et l’usure physique associés à des années de pratique : « Même lors des compétitions les plus exigeantes, on risque de tomber une ou deux fois, car nous essayons constamment des manœuvres difficiles, le fait de tomber est la preuve que nous cherchons toujours à nous améliorer et à relever de vrais défis. »
Face à la peur des chutes, la devise est « travail et rééducation ». Une citation de la légende du skateboard, l’Américain Paul Rodriguez, est souvent reprise par les professionnels dans leurs posts Instagram ou lors des conférences de presse : « Tu tomberas plus souvent que tu ne réussiras, et plus tu l’acceptes tôt, mieux c’est. » « Tout le monde a peur de tomber. Les skateboarders manquent plus leurs figures qu’ils ne les réussissent, ce qui est incroyable », a confirmé l’Australienne Chloé Covell, 14 ans, l’une des favorites de la compétition et l’une des plus jeunes athlètes des Jeux Olympiques, tout comme la Française Lucie Schoonheere, qui sera en compétition dimanche.
Skateurs partagent leurs expériences sur la manière dont la crainte des blessures vient avec l’âge. Roos Zwetsloot, une Néerlandaise de 23 ans qui s’est classée cinquième aux Jeux de Tokyo 2021, avoue que cette crainte peut être déstabilisante. « Quand j’étais plus jeune, tomber ne me dérangeait pas trop. Maintenant, c’est un peu plus compliqué », explique-t-elle. Andrew Macdonald, un participant britannique de 50 ans, développe en expliquant qu’avec l’âge, le temps de récupération augmente. Il dit : « Les gens me demandent si ça fait plus mal. Je leur dis que la douleur est la même, mais que le rétablissement est plus long. » La gestion des blessures et les soins constituent une part significative de leurs carrières. « Cela nécessite une quantité conséquente de travail, une grande patience, beaucoup de rééducation », décrit Vincent Milou, un des favoris français à monter sur le podium, avec Aurélien Giraud. Au cours des Jeux de Tokyo, trois des quatre médailles d’or ont été remportées par les Japonais, avec aussi trois médailles d’argents décernées aux Brésiliens.