Après une attente de cent vingt ans, le Bayer Leverkusen peut enfin célébrer son premier titre de champion d’Allemagne, mettant fin longtemps aux moqueries et à la malchance qui ont donné naissance à son surnom « Bayer Neverkusen ». Le dimanche 14 avril, en battant le Werder Brême (5-0), le club s’est offert une victoire historique devant son public dans la BayArena. Face à l’excitation, les joueurs, à dix minutes de la fin, ont dû appeler les fans à retourner dans les tribunes lorsque ces derniers ont commencé à envahir le terrain après le quatrième but de Bayer (83e), le deuxième du jour pour leur milieu Florian Wirtz. Malgré la diffusion des fumigènes, le match a pu continuer jusqu’à ce que le prodige du football allemand marque son triplé (90e). Il était alors impossible pour le stade de contenir sa joie, totalement submergé par une vague rouge.
Cela a été une véritable délivrance pour les supporters qui avaient constamment souffert des déceptions traumatisantes des années 2000. Lors de la saison 1999-2000 de Bundesliga, Leverkusen était passé à côté du titre de justesse lors de la dernière journée, battu par le Bayern Munich sur la différence de buts. Deux ans plus tard, le Bayer était sur le point de réaliser le triplé, mais en dix jours, il a perdu la finale de la Coupe d’Allemagne et la Ligue des champions, outrepassé par le Borussia Dortmund dans le championnat.
Dans cette occasion, il avait bien préparé les choses, le sacre était devenu un secret de polichinelle, tant l’avantage sur ses poursuivants était significatif. Avant la 29ème journée, soit six matchs avant la fin, Leverkusen menait avec une avance de 16 points sur le deuxième, Bayern Munich, et le troisième, Stuttgart. La question était donc de savoir quand il allait frapper le coup fatal.
Le club de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, fondé en 1904 par le chimiste Bayer, avait deux possibilités pour réaliser son rêve ce week-end. La première : que ses concurrents perdent leurs matchs respectifs samedi, à domicile – face à Cologne, un candidat à la relégation, pour les Bavarois (2-0), et contre Francfort pour les Badois-Wurtembergeois (3-0). Cependant, Xabi Alonso n’était pas très confiant. « À mon avis, ce serait une énorme surprise », supposait – correctement –, avec un air sceptique, l’entraîneur de Leverkusen, lors de la conférence de presse d’avant-match.
La deuxième option, gagner contre le Werder Brême, une équipe du milieu de classement de la Bundesliga (12ème avant le match). Une solution qui était de toute façon privilégiée par l’Espagnol : « Pour être franc, je préférerais que nous remportions le titre sur le terrain grâce à notre victoire. » Et même si le Basque refusait d’envisager trop tôt une éventuelle célébration, il se disait « prêt » à recevoir la traditionnelle douche de bière que les joueurs sacrés arrosent habituellement leur entraîneur à la fin du match. Il n’a pas été déçu.
Quarante-trois matchs sans perdre.
Ce sacre est le couronnement d’une saison déjà formidable pour Leverkusen, qui n’a essuyé aucune défaite dans toutes les compétitions depuis mi-août, soit 43 matchs (avec 38 victoires et 5 matchs nuls). Il s’agit d’un record pour une équipe allemande. De plus, le club a une occasion unique de devenir la première équipe allemande à terminer une saison sans perdre. Depuis 1945, seules quatre équipes des cinq grands championnats européens ont réussi cet exploit : Pérouse en 1978-1979 (qui a fini 2ᵉ toutefois), l’AC Milan de 1991-1992, la Juventus Turin en 2011-2012 et Arsenal, surnommés « Invincibles », sous la houlette d’Arsène Wenger, en 2003-2004.
L’ascension de Bayer signifie la fin de l’hégémonie du Bayern Munich en Bundesliga, qui a été contraint de renoncer au titre qu’il détenait sans interruption depuis 2013. L’année dernière, le Bayern avait connu des difficultés face au Borussia Dortmund et n’avait sauvé son titre que de justesse. Mais la situation n’était pas aussi serrée: il n’y avait que 2 points d’écart entre les Bavarois et le BVB à l’approche de la fin de la saison.
Leverkusen a maintenant l’opportunité de réaliser un « triplet », car ils sont toujours en course en Coupe d’Allemagne, qui se jouera le 25 mai contre Kaiserslautern, ainsi qu’en Ligue Europa, avec le quart de finale retour contre West Ham prévu le 18 avril. C’est une grande opportunité pour le club qui a longtemps été résigné aux places d’honneur. Même s’ils échouent dans les prochaines semaines, ils ne seront plus jamais surnommés « Bayer Neverkusen ».
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