Dans sa quête de « dire la vérité aux citoyens français », Michel Barnier ne cache pas sa position délicate à Matignon. « Je suis conscient que je suis à la merci du Parlement. Si la gauche et le Rassemblement national s’unissent [sur une motion de défiance], je démissionnerai », a déclaré le Premier ministre dans une interview à La Tribune Dimanche du 6 octobre. Le mardi 8 octobre, une semaine à peine après son discours de politique générale, M. Barnier ressentira l’instabilité de son manque de majorité : presque tout le bloc de gauche – 192 députés – défendra une motion de défiance visant à mettre fin à ce qui, selon eux, représente « un déni du résultat des dernières élections législatives ».
Pour le Nouveau Front Populaire (NFP), la censure du gouvernement est avant tout une question de principe. « Permettons-nous à Emmanuel Macron de choisir un Premier ministre provenant du cinquième groupe de l’Assemblée Nationale, sans logique institutionnelle? » demande Cyrielle Chatelain (Isère), la présidente du groupe Écologiste et Social. « La seule raison pour laquelle il le fait est pour continuer sa politique. » Sur le fond, le choix de la censure ne fait aucun doute. De l’ancien président François Hollande aux partisans de Mélenchon, tous souhaitent avant tout punir un gouvernement de droite. La gauche impose ainsi un « vote de confiance négatif », alors que Michel Barnier a choisi de ne pas s’y soumettre.
Cyrielle Chatelain a explicité que ceux qui soutiendront la motion de censure souhaitent l’arrêt de la politique d’Emmanuel Macron. Elle sous-entend que ceux qui ne voteront pas pour la censure, en particulier le Rassemblement National (RN), ne le souhaitent pas. Ainsi, lors de la session de mardi à l’Hémicycle, il deviendra évident que la survie du gouvernement Barnier dépend de l’appui, explicite ou non, de l’extrême droite. Le NFP prévoit de mener une campagne intense contre Marine Le Pen, leader des députés RN, sur cette question.
Ambitieux, le NFP envisage aussi de transformer le vote de censure en un vote sur l’abrogation de la réforme des retraites. C’est une autre façon de mettre le RN sous pression, qui propose cette abrogation lors de sa séance parlementaire du 31 octobre, mettant ainsi la gauche dans une situation inconfortable.
Avec un sursis accordé au gouvernement Barnier, le RN se met dans une position d’attente, se préparant à jouer le rôle de faiseur de roi. Lors du discours de politique générale de Michel Barnier, Marine Le Pen a assuré à l’ex-commissaire européen qu’elle le jugerait sur ses actes et non à partir de postures immatures, une remarque destinée à la gauche.
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