Cette année, durant ses vacances à La Trinité-sur-Mer où se trouve sa maison familiale, Marine Le Pen a de nouveau plongé dans son ancienne vie d’avocate. Elle a consacré du temps à étudier le dossier qui pourrait la condamner à une peine allant jusqu’à dix ans de prison, une amende d’un million d’euros et une ineptitude juridique susceptible de compromettre ses ambitions présidentielles de 2027. Ce dossier volumineux et cette affaire donc la gravité ne fait aucun doute pourraient porter atteinte à l’extrême droite qui voit le pouvoir à portée de main.
Depuis une décennie, Marine Le Pen voit l’enquête judiciaire centrée sur les assistants parlementaires du Front National (devenu Rassemblement National, RN) au Parlement Européen progresser. Le procès, qui commencera le lundi 30 septembre, sera prévu jusqu’au 27 novembre et elle en sera la principale concernée. La dirigeante du parti d’extrême droite sera jugée avec vingt-quatre autres personnes, ainsi que le Front National, considéré comme une personne morale pour « détournement de fonds publics », « recel » de ce délit ou « complicité ». Ils sont tous suspectés d’avoir constitué un système pour financer les dépenses du FN grâce au Parlement Européen, et ce, entre 2004 et 2016, en employant des assistants parlementaires qui travaillaient en réalité pour le parti.
Selon le réquisitoire du parquet de Paris délivré le 18 septembre 2023, les détournements de fonds publics commis par le Front National résulteraient d’un « système centralisé parfaitement élaboré ». Le préjudice résultant de ce « système », évalué pour la période 2009-2017, s’élèverait à 6,8 millions d’euros selon le Parlement Européen.
Dans son rôle de présidente du mouvement de 2011 à 2021, elle avait dû faire face à un flux constant de manœuvres dilatoires de la part du RN. Ironiquement, l’héritière du lepénisme est aujourd’hui prévenue d’assumer pleinement son rôle d’arbitre de la fortune gouvernementale, alors que le procès s’ouvre la veille de la reprise des travaux à l’Assemblée nationale et de la présentation de la politique générale du Premier ministre, Michel Barnier. « Elle observe chaque détail minutieusement », explique un homme.
« Le timing est catastrophique. Néanmoins, elle est convaincue qu’elle a beaucoup de choses à exprimer et estime que c’est son rôle de les exprimer. » Ces paroles sont prononcées par une figure clé de la défense du RN, confortablement assise sur le canapé moderne d’un appartement bourgeois. C’est Me Alexandre Varaut qui a conçu cette stratégie en collaboration avec Marine Le Pen dès le début. Cependant, lorsqu’est arrivée l’heure du procès, l’avocat a changé de cap. Il a demandé à Marine Le Pen une place éligible sur la liste pour les élections européennes. À la suite de cet accord intrigant, Me Varaut, un homme poli issu d’une lignée maurrassienne de droite, est devenu Alexandre Varaut, député européen et porte-parole du RN.
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