Victoire de la gauche aux législatives

Les résultats des élections législatives ont conduit à une confrontation entre le Président de la République et le Nouveau Front Populaire (NFP), dans l’anticipation de la désignation d’un premier ministre représentatif du triomphe modeste de la gauche au tour suivant. Cette conjoncture, qui semble effacer toutes autres entités politiques à la suite de cette élection, est le fruit de l’imprévu succès du front républicain, mais est également dû à l’insuffisance professionnelle du Rassemblement National (RN). Les candidats RN n’ont pas réussi à s’affirmer dans une discussion politique où leurs principes et compétences paraissaient déphasés avec les attentes des Français.
Le verdict du round final des législatives peut être justement vu comme l’opposition à la perspective de voir Jordan Bardella à Matignon. Le RN n’a pas réussi à se dédouaner complètement, suite aux malheureuses déclarations de certains candidats et n’a pas convaincu de sa capacité à gouverner dans un monde où des décisions immédiates sont nécessaires face aux menaces internationales et environnementales.
Néanmoins, il serait incorrect d’en conclure à une domination de la gauche sur les valeurs et le vote des français. À cet effet, les effets induits du renoncement à la faveur du candidat le plus fort contre le candidat RN au second tour peuvent être trompeurs. Les conclusions de l’enquête électorale d’Ipsos pour Le Monde, la Fondation Jean Jaurès, le Centre de recherches politiques de Sciences Po, et l’Institut Montaigne, menée du 26 juillet au 1er août, révèlent des résultats très significatifs.
Les enseignants représentent le dernier refuge de la gauche.

En examinant les résultats électoraux non pas en fonction des sièges, mais du nombre de voix, le RN se distingue comme le leader parmi toutes les professions, avec la droite surpassant la gauche. Par exemple, lors du deuxième tour, les employés du secteur privé ont voté à 23% pour les candidats du NFP, 23% pour ceux du parti présidentiel et 54% pour l’ensemble des candidats de droite. Cela suppose que la politique de Macron n’est pas considérée comme de droite, y compris 42% pour les candidats RN et de droite souverainiste. Le soutien électoral des ouvriers pour le RN n’a pas diminué, les candidats du parti recueillant 59% du vote ouvrier qualifié de l’industrie. Les candidats des Républicains (LR) et divers droite (DVD) ont obtenu 6%, ceux du parti présidentiel 13%, alors que ceux de gauche ont obtenu 22%.

Il est à noter que le soutien pour le RN s’étend également en termes qualitatifs, avec une continuité de l’élargissement de son électorat pour intégrer les classes sociales moyennes et supérieures. Les candidats RN ont obtenu d’importants scores parmi les professions libérales (28%), les cadres du secteur privé (32%), et les cadres de toutes les trois fonctions publiques (31% en moyenne). Seuls les enseignants restent un bastion de la gauche, avec 34% ayant voté pour la gauche (dont 32% pour le NFP), 32% pour Ensemble (la coalition pour le camp présidentiel), 12% pour les DVD et LR et 20% pour le RN. Toutefois, en moyenne, dans la fonction publique de l’État, les partis de gauche totalisent 26%, Ensemble 27%, LR et les DVD 11% et le RN 36% – un record historique.

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