Malgré lui, le gouvernement de Gabriel Attal est sur le point de marquer l’histoire en ayant le record du gouvernement le plus long dans la gestion des affaires courantes depuis la deuxième guerre mondiale, voire même avant. Le 24 août marquera le trente-neuvième jour depuis qu’Emmanuel Macron a accepté la démission du gouvernement et signé le décret mettant fin au mandat du Premier ministre et de son équipe. Pendant ces trente-neuf jours, le gouvernement démissionnaire, par tradition républicaine, est resté opérationnel pour assurer le fonctionnement minimal de l’Etat.
Cette durée est inédite dans l’histoire. Depuis 1958, sous la Cinquième République, les périodes de gestion des affaires courantes ont généralement été courtes : un à trois jours en général, neuf jours maximum en 1962. Selon les politologues Alejandro Ecker et Thomas Meyer, la France était donc le pays européen avec la transition la plus rapide entre les gouvernements.
Durant la Quatrième République, la durée était plus longue. Selon Jean Massot, conseiller d’Etat, qui a développé le sujet dans la revue Pouvoirs en 1996, la durée moyenne était de deux semaines. Le pic fut atteint au printemps 1953, après la chute du gouvernement radical de René Mayer, où trente-huit jours ont été nécessaires pour nommer un nouveau président du Conseil. Joseph Laniel, un député indépendant favorable à l’union nationale et un industriel, fut élu après que sept candidats, dont Pierre Mendès France, ont décliné le poste ou ont été bloqués par l’Assemblée, en grande partie à cause de la lassitude des députés.
L’expérience sans précédent de Gabriel Attal a dévoilé les contraintes de l’opération. La constitution de la IVe République avait le concept de gestion des affaires courantes, conçu pour des durées limitées. Même si ce n’est pas explicitement inscrit dans la Constitution de la Ve République, il est toujours en vigueur selon la jurisprudence, en tant que « principe traditionnel du droit public ».
Cela a été affirmé par le Conseil d’Etat en octobre 1962 : tant qu’un nouveau gouvernement n’est pas établi, celui qui a démissionné ne peut plus initier de nouvelles actions mais peut « assumer… la responsabilité de la gestion des affaires courantes ».
Ces « affaires courantes » restent à clarifier. Selon une note du secrétariat général du gouvernement en date du 2 juillet, elles peuvent être de deux types: soit des affaires quotidiennes, « si manifestement liées au fonctionnement normal de l’État qu’elles ne nécessitent pas de jugement politique », soit des affaires urgentes, qui ne peuvent pas être reportées. En fin de compte, elles représentent toutes les décisions qui seraient vraisemblablement prises par quelconque gouvernement, principalement parce que elles sont soit totalement évidentes soit déterminées par les circonstances, comme le résume le secrétariat général.
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