La province Sud et la province Nord sont séparées par Poya qui s’avère être très différente du reste de la ruralité calédonienne. Le chemin reliant le nord au sud de l’île Grande-Terre est traversé par la route territoriale 1 qui passe également par la commune, similaire à Saint-Louis en périphérie de Nouméa ou Thio sur la côte est, toutes étant des points tenseurs sur le territoire. À l’endroit où le chemin bifurque vers les tribus de Nekliai et de Gohapin, on trouve une concentration de jeunes armés, furieux et prêts à repousser une légère force de gendarmes en lançant des pierres et criant « Allah akbar » malgré leur éducation catholique ou protestante. Le motif des protestations des jeunes reste flou. Confrontés à une hostilité injustifiée et prétendue envers notre profession journalistique inoffensive, nous avons été contraints de quitter.
Notre périple nous a ensuite conduit à Koné, puis à la ‘transversale’, un trajet de près de 90 minutes sur des routes sinueuses à travers les montagnes qui nous ont conduit sur le versant est de l’île, le foyer du mouvement indépendantiste. Au cœur des montagnes, dans la tribu de Bopope, un signalement nous a incité à ralentir notre progression. C’est là que Joël (un nom d’emprunt pour préserver son anonymat) nous a fait signe, proposant un café. Avec ses dreadlocks dissimulées sous un bonnet tricolore vert, jaune et rouge, il a pris soin de mentionner que le fusil posé sur la table était destiné à la chasse.
Pour cause de vacances scolaires, le refuge où les militants se relaient continuellement évoque un camp de vacances. En utilisant les nombreux bambous de la région, adultes et enfants confectionnent des peignes à revendre au bord des routes, tout en échangeant sur la politique. « Si le texte concernant le droit de vote est annulé demain, nous mettons fin à la mobilisation », confie Joël. Cependant, tous ne partagent pas cet avis.
Nous sommes ensuite poliment encouragées à « prendre soin de [nous] » et à « sélectionner scrupuleusement [notre] langage » lorsque nous descendrons des montagnes pour arriver sur la côte. Au bout du chemin, tournant à l’est, se trouve Poindimié. L’église de Tyé, classée au patrimoine historique, vient d’être incendiée. Malgré sept foyers de départs de feu, l’édifice a survécu. Sans aucun indice sur l’identité de l’incendiaire, Jean-Marie Naboume, le président du conseil paroissial, garde une attitude fataliste. Sa mère, une habituée de la prière quotidienne dans la chapelle, pleure la destruction de cet endroit de culte. M. Naboume se contente de dire : « Il y a des évènements incontrôlables ».
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