Face à la vie politique, la campagne pour les élections législatives a mis en évidence la variété des tactiques syndicales. Tandis que le Rassemblement national (RN) est susceptible de suivre le même élan que lors des élections européennes, où ils étaient en première position, les huit principales forces syndicales sont partagées entre le souhait de faire progresser leurs revendications, l’appréhension de régressions démocratiques et le rejet d’une utilisation à des fins politiques. Leur ligne de conduite est délicate à maintenir, car elles peuvent être critiquées pour être soit trop impliquées, soit trop frileuses dans un contexte où nos institutions pourraient être remises en question.
Parmi les acteurs en jeu, deux voix se distinguent particulièrement : celles de la CGT et de la FSU. Elles ont toutes deux fait un choix explicite en incitant les citoyens à soutenir les candidats du Nouveau Front populaire (NFP). Pour la premère, l’objectif est double : empêcher le RN d’accéder au pouvoir et venir à bout de plusieurs revendications, comme l’a explicité Sophie Binet, sa secrétaire générale. Elle a notamment évoqué « l’annulation » de la réforme des retraites de 2023, un élément central défendu par les partis de gauche lors de ces élections législatives.
Le discours de la FSU est similaire : pour contrer l’extrême droite, qui s’est développée grâce à des « décennies de politiques libérales génératrices d’inégalités et de détresse sociale », une « véritable alternative progressiste » est nécessaire, ce que le NFP propose à travers son programme.
« Une rupture » initialisée.
Il est à noter le positionnement pris par le syndicat de la CGT, malgré son caractère non inédit. L’historien, Stéphane Sirot, souligne que le syndicat a déjà invité à voter pour un candidat, cependant, cela est rare au premier tour et il faut retourner à la période du second tour de l’élection présidentielle en 1981 pour le voir. Sirot ajoute que, depuis lors, les directives de l’organisation dirigée par Mme Binet ont parfois mis l’accent sur la résistance à l’extrême droite ou, en 2012, sur la défaite de Nicolas Sarkozy, ce qui a impliqué implicitement un soutien à François Hollande via le vote.
La décision prise par la confédération pour les élections législatives est loin d’être ordinaire, selon Sirot, car elle rompt avec une pratique mise en place depuis l’époque où Louis Viannet tenait le rôle de secrétaire général de la confédération, au début des années 90. « Le choix de la CGT est une rupture », appuie le sociologue Guy Groux, membre du centre de recherche politique de Sciences Po. Il ajoute: « La question qui se pose maintenant est de savoir si c’est une action ponctuelle ou un changement durable de leur doctrine ».
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