Bien que symbolique, la victoire est fortement politique. Jeudi 30 mai, l’Assemblée nationale a voté en faveur d’une proposition communiste demandant au gouvernement de soumettre à son examen le traité de libre-échange CETA entre l’Union européenne (UE) et le Canada, qui est vivement contesté par tous les partis d’opposition.
Bien qu’elle ne soit pas contraignante, cette résolution a été adoptée par 151 votes (contre 4), grâce à une coalition d’opposants de gauche, de LR et de RN, tandis que le parti présidentiel s’abstenait. Elle vise à augmenter la pression sur le gouvernement, suite au refus du projet de loi de ratification du CETA par le Sénat en mars. Suite à ce revers, le gouvernement a décidé de retarder l’examen du CETA à l’Assemblée nationale.
Adopté à l’échelle européenne en 2017, l’accord de libre-échange est déjà en vigueur en France, mais le texte de ratification est en stagnation dans le processus parlementaire. À dix jours des élections européennes, le ministre délégué au commerce extérieur, Franck Riester, a déclaré que le sujet était « exploité » de manière « électorale ». Il a choqué la Chambre en dénonçant le « spectacle lamentable de ceux qui mentent » sur les conséquences du CETA et « l’indécence » d’une « alliance opportuniste » entre les partis d’opposition.
Selon le gouvernement, c’est un « bon accord », en particulier pour les producteurs de lait, les fromagers et les viticulteurs. Cependant, le gouvernement n’a pas l’intention de soumettre le CETA à la Chambre avant la fin de 2024 ou le début de 2025, après une mission parlementaire confiée au député de la République en marche, Benoit Mournet, et au sénateur du centre droit, Daniel Fargeot.
Un « hold-up démocratique ».
André Chassaigne, le président du groupe communiste, a noté que le retardement de l’examen du texte est une cause de guerre pour l’opposition, ce qui est extrêmement rare sous la Cinquième République. Dans l’assemblée, il a sévèrement critiqué le manque de transparence dans les négociations sur le CETA, le colza génétiquement modifié et l’importation de boeuf. L’écolo Marie Pochon a affirmé que cet accord est un acte de banditisme démocratique.
Timothée Houssin du RN a condamné la compétition des fermes industrielles canadiennes, tandis que Pierre-Henri Dumont de LR a accusé un contournement du Parlement. Face à ces arguments, Christopher Weissberg, le représentant de la Renaissance française dans l’Amérique du Nord (Canada, États-Unis), a pris position en faveur du CETA, et a critiqué l’opposition qui émet des plaintes inutiles juste avant les élections européennes.
Selon Weissberg, les règles du CETA sont plus avantageuses pour nos agriculteurs et viticulteurs que celles du commerce en dehors de l’accord. Pour éviter toute accusation d’obstruction démocratique, le groupe Renaissance a décidé de s’abstenir du texte des communistes. Jean-Louis Bourlanges du MoDem a également déclaré qu’un accord bilatéral avec le Canada serait préférable à la loi de la jungle du commerce général.
En dépit du rejet de son texte par la commission, Pierre Dharréville, membre du groupe communiste, va appeler à la constitutionnalisation de la Sécurité sociale lors de la journée réservée aux propositions communistes, invoquant qu’elle est fréquemment ciblée par les incursions libérales. Les communistes espèrent encore remporter plusieurs victoires.
Néanmoins, le groupe peut toujours aspirer à plusieurs victoires, surtout s’il réussit à mettre en place une proposition de loi du secrétaire national du PCF, Fabien Roussel, pour une prise en charge améliorée des traitements du cancer du sein avant la fin du débat à minuit. Le projet de loi vise à rembourser tous les soins, y compris ceux dits « de support » comme les prothèses capillaires, le remplacement des prothèses mammaires, et autres. Il a été approuvé en commission, mais un amendement de Renaissance a exclu les dépassements d’honoraires, ce qui explique pourquoi les députés de LFI et socialistes proposeront leur réintégration. Avant cela, plusieurs propositions concernant les territoires ultramarins pourraient obtenir un vote positif, comme celle qui demande une enquête sur l’indécence et le manque d’accès au logement social, portée par Karine Lebon (Réunion). Une proposition de loi de Frédéric Maillot (Réunion), qui suggère l’apprentissage des langues et cultures régionales dans les écoles maternelles et primaires de ces territoires, a également obtenu l’accord de la commission. Pour commencer, Marcellin Nadeau, député de la Martinique, a obtenu un vote pour une résolution demandant que les politiques publiques prévoient et contribuent davantage à la prévention des risques liés au changement climatique et à la montée des eaux dans les villes côtières.
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