L’époque où Jean-Marie Tjibaou, le dirigeant kanak, avait exclu gentiment Louis Le Pensec, le ministre des départements et territoires d’outre-mer, de son bureau parisien de la rue Oudinot en 1988 pour discuter du lieu prévu pour le futur centre culturel kanak avec un maire calédonien anti-indépendantiste semble bien révolue. « Nous souhaiterions en parler entre nous », avait-il humblement demandé au ministre.
Au printemps 2024, un tel évènement semble irréaliste. La Nouvelle-Calédonie est actuellement en train de vivre une vague de violence qu’elle n’a pas connue depuis le début des années 1980. Quatre vies, dont celle d’un gendarme, ont été perdues lors des émeutes urbaines.
Face à une situation qualifiée d' »insurrectionnelle » par le haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie, Louis Le Franc, l’état d’urgence a été déclaré le mercredi 15 mai. Cette mesure permet de limiter la liberté de mouvement et de rassemblement. Par ailleurs, quatre escadrons de gendarmerie mobile et des renforts des unités d’intervention de la police nationale (RAID) et de la gendarmerie (GIGN) ont été envoyés sur l’archipel, s’ajoutant aux 1 800 membres des forces de l’ordre déjà présents.
Des troupes militaires ont été mobilisées pour instaurer la sécurité au port et à l’aéroport de Nouméa, un couvre-feu a été instauré et l’usage du réseau social TikTok a été interdit. Gabriel Attal, le dirigeant du gouvernement, a affirmé mercredi soir que la priorité essentielle était le rétablissement de l’ordre et de la tranquillité. Son discours a été prononcé lors d’une réunion de crise interministérielle à Place Beauvau où il était accompagné de Gérald Darmanin, locataire des lieux, Eric Dupond-Moretti, ministre de la Justice et Sébastien Lecornu, ministre des forces armées.
L’Elysée a assuré en début d’après-midi que toutes formes de violences étaient inacceptables et qu’elles seraient confrontées à une réaction sans faille pour garantir le retour de l’ordre républicain, tandis que le président, ayant annulé deux visites en Normandie à cause de la rébellion indépendantiste, venait de présider un premier conseil de défense et de sécurité nationale dédié à la situation dans l’île. Un second conseil de défense est prévu pour le lendemain matin, après quoi Emmanuel Macron a suggéré un « échange virtuel » avec les représentants calédoniens.
La pression sur les indépendantistes s’accroît de la part du gouvernement.
Une réforme concernant le corps électoral, contestée par les indépendantistes kanak, a déclenché une crise à 17 000 km de distance de la capitale française, Paris, il y a trois jours. Les Kanaks craignent que cette révocation les place constamment en situation minoritaire. Une loi constitutionnelle, récemment votée par les députés et déjà approuvée par le Sénat, propose d’étendre le droit de vote lors des prochaines élections provinciales à tous les citoyens vivant en Nouvelle-Calédonie depuis une décennie, ce qui ajoute 25 000 nouveaux électeurs. Le Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste (FLNKS) demande le retrait de cette loi, dans le but de maintenir les conditions favorables pour l’obtention d’un accord politique global entre les représentants calédoniens et l’Etat français. Cependant, vous devez être abonné pour lire le reste de cet article, qui constitue 54.57% du contenu total.
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