En dépit des troubles violents rencontrés en Nouvelle-Calédonie, le gouvernement continue de mettre en œuvre sa réforme constitutionnelle à la suite de l’approbation de l’Assemblée nationale le mardi 14 mai dernier. Le vote concernait l’intégralité du texte déjà validé par le Sénat.
A la fin de la journée, les députés ont donné leur accord sur le premier article, qui est l’élément central de la réforme. Cet article étend le corps électoral du scrutin provincial de Nouvelle-Calédonie à tous les citoyens vivant sur place depuis dix ans. Les indépendantistes sont contre cet article car ils s’inquiètent que cela affaiblira le poids électoral des Kanak. Le député La France insoumise, Bastien Lachaud, a exprimé ses inquiétudes quant aux risques que cela pourrait représenter pour la paix civile.
Les discussions ont avancé lentement mardi, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, reprochant à LFI un blocage parlementaire, car celui-ci défendait des amendements qui ne modifiaient parfois qu’un seul mot ou une phrase. Les députés de LFI ont rejeté ces accusations, comme l’a fait Danièle Obono qui plaidait en faveur de ces amendements « rédactionnels » pour prendre le temps de s’exprimer sur le contenu du projet.
Sylvain Maillard, président du groupe Renaissance, a rappelé mardi matin que « un processus démocratique ne peut pas s’arrêter parce qu’il y a de la violence sur le terrain », en référence aux violences qui ont conduit à plus de 130 arrestations dans l’archipel, selon le dernier décompte.
La gauche avait souhaité retarder l’examen ou retirer le texte. Marine Le Pen, présidente du groupe Rassemblement National (RN), et Olivier Marleix, son homologue des Républicains (LR), ont plaidé unanimement avec la majorité pour que le vote ne soit pas reporté.
Dans un tournant, la gauche a demandé de retarder la discussion ou de supprimer le texte. « Retirer le projet de loi constitutionnelle est le seul chemin vers l’apaisement », a déclaré André Chassaigne, président du groupe communiste, à Gabriel Attal lors des questions au gouvernement, une requête également exprimée par Mathilde Panot (LFI) de son parti. « Mettez en veilleuse l’évaluation de cette réforme », a chargé Arthur Delaporte du Parti socialiste (PS).
« Le dégel de l’électorat est un enjeu démocratique crucial, inévitable », a répliqué le premier ministre. Il a encouragé à « parvenir à un accord politique le plus consensuel possible » et a également exhorté « les dirigeants politiques calédoniens à saisir cette opportunité ».
Dans un post de blog, le dirigeant de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a plutôt exhorté le président de la République à « reconnaitre la nouvelle situation et [à] accepter le retrait » du texte.
Avant la reprise des débats, Boris Vallaud, président du groupe PS, a demandé la convocation du « groupe de contact » sur la Nouvelle-Calédonie. La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet a effectivement convoqué ce groupe, rassemblant notamment les députés du territoire et des représentants de chaque groupe. « Dans le contexte actuel en Nouvelle-Calédonie, spécialement à Nouméa, nous sommes tous unanimes à appeler au calme et à la reprise du dialogue », a annoncé Yaël Braun-Pivet après une réunion d’une heure environ.
Le président Macron a suggéré d’inviter toutes les parties néo-calédoniennes à Paris pour une rencontre avec le gouvernement afin de renouer le dialogue. Il a également promis qu’il n’organiserait pas « immédiatement » le Congrès du Parlement nécessaire pour modifier la Constitution après une éventuelle adoption du texte, pour donner une dernière chance aux pourparlers entre les parties locales.
L’expansion prévue du corps électoral pour les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie provoque des tensions. A l’heure actuelle, le droit de vote est principalement accordé à ceux qui étaient inscrits pour un vote précédent en 1998 et à leurs descendants, excluant donc ceux arrivés après 1998 et un grand nombre de locaux. Au Sénat, une disposition a été mise en place pour suspendre cette modification constitutionnelle si un consensus local est atteint jusqu’à dix jours avant les prochains scrutins.
Cependant, cette expansion envisagée a rencontré une opposition de la part des indépendantistes et a entraîné d’importantes violences, notamment des pillages, des incendies de maisons et des attaques contre les forces de l’ordre, dans la soirée du lundi au mardi en Nouvelle-Calédonie. Le Haut-Commissaire de la République a instauré un couvre-feu à Nouméa, qui a commencé à 18h locales mardi soir (9h à Paris).
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