En ce lundi d’avril, Jean-Luc Mélenchon, le fondateur de La France insoumise (LFI), est attendu par un comité d’accueil résolument déterminé à la rue Saint-Guillaume à Paris. Menant une campagne pour le scrutin européen, Mélenchon est censé présenter une conférence aux étudiants de Sciences Po. Des activistes du groupe d’extrême droite Nemesis ont affiché des signes exprimant « voile = soumission » et ont clamé avec l’UNI, une structure juvénile d’extrême droite, que « tout le monde déteste les islamistes ». En opposition, des partisans « insoumis », portant des drapeaux violets, leur ont crié « à bas les fascistes ». À l’écart des disputes, l’atmosphère est très différente dans l’amphithéâtre Boutmy où environ 800 étudiants, selon les « Jeunes insoumis de Sciences Po » qui ont orchestré l’évènement, accueillent Mélenchon, candidat à trois reprises à la présidentielle, sous une salve d’applaudissements.
L’idée de recevoir leur leader hante le groupe d’étudiants depuis des mois. Une première réunion a été programmée en octobre 2023, mais a dû être reportée suite aux recommandations de la préfecture de Paris qui s’inquiétait de possibles menaces sécuritaires. Cependant, le préfet Laurent Nuñez a indiqué qu’il n’y avait aucun motif d’interdiction pour cette fois. Cela n’a pas empêché Mélenchon de « remercier la direction de Sciences Po » magré le fait qu’elle « n’a pas cédé aux pressions ». Il faisait allusion aux trois conférences avortées dans les universités de Bordeaux, Rennes et Lille, surtout le jeudi 18 avril. C’est en ce moment que Mélenchon a renoué avec l’excès, en comparant le doyen de la faculté de Lille au nazi Adolf Eichmann, l’un des architectes principaux de la Shoah.
La réaction politique a été vive après un commentaire controversé. Fabien Roussel, le leader des communistes, a déclaré sur BFM-TV, lundi 22 avril, que Mélenchon était « insoutenable ». « Ses déclarations outrancières discréditent tout le reste », a-t-il ajouté, lui qui a déjà été victime de comparaisons douteuses dans le passé. Sophia Chikirou, députée LFI de Paris et proche confidente de Mélenchon, l’avait comparé en septembre 2023 à Marcel Déat, un collaborateur notoire.
« Ne recule jamais, cela n’a aucun intérêt. »
Lundi soir, à Sciences Po, Jean-Luc Mélenchon a adopté une attitude plus calme face aux étudiants. Remplissant le rôle de l’ancien sage, il a adopté une attitude calme et pédagogique, parsemant ses discours de références à Kant, aux stoïciens ou à Colette Audry, une écrivaine et militante française qui était proche de Simone de Beauvoir.
Il a maintenu ses remarques sur Eichmann, les replaçant dans les travaux de Hannah Arendt, la philosophe allemande qui avait assisté et étudié le procès du criminel de guerre, créant l’illusion que mentionner son concept de « la banalité du mal » neutralisait la comparaison offensante. « L’adversaire n’est pas seulement l’extrême droite, mais le réseau immense des peurs », a réitéré l’insoumis. Il a partagé un conseil qu’il a toujours appliqué à lui même : « Ne reculez jamais, c’est inutile », a-t-il affirmé. Dénonçant la « caste médiatique » qui l’accuse de semer « le chaos », dans un discours bien organisé, il a encouragé son auditoire à entreprendre une « réflexion critique et morale ». Le reste de ce texte est disponible exclusivement pour les abonnés.
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