Un nouveau chapitre se dessine dans l’histoire de l’association féministe, le Planning familial. La décision a été prise le mardi 29 octobre de solliciter des témoignages pour vérifier si des femmes, qu’elles soient membres ou patientes, ont subi des violences sexuelles lors de leur accueil aux premiers jours du mouvement, dans les années 1960, par le docteur Henri Fabre, un des fondateurs de l’association. L’enquête se concentre notamment sur la période de 1961 à 1975, qui a vu de nombreux professionnels de santé, comme le Dr Fabre, créer et gérer des associations locales du Planning, ce qui pourrait justifier une expansion de la demande de témoignages.
L’actuelle coprésidente, Sarah Durocher, souligne la nécessité de se pencher sur cet aspect, question qui touche toute la société, concernant les violences sexuelles et sexistes. Elle se demande comment le Planning pourrait être épargné par de tels actes? En octobre 2021, le témoignage d’Irène (qui ne veut pas révéler son nom de famille), maintenant âgée de 84 ans, arrive à l’une des branches de Grenoble, le lieu de naissance du mouvement. L’ex-enseignante révèle, presque 60 ans jour pour jour après l’incident, son agression par le Dr Fabre, figure clé du mouvement, lors d’une consultation. Irène est entendue, on lui prête attention. Quelques semaines plus tard, elle reçoit un email signé par plusieurs employées, recognisant son courage et promettant « de donner suite à son témoignage ».
Une réunion prévue à Paris avec des déléguées nationales n’a pas abouti. Irène, dont l’anniversaire tombait à cette date, a exprimé son indisponibilité, mais s’est montrée ouverte à toute autre occasion. Cela a déclenché une attente de près de trois ans, que l’octogénaire a choisi de briser en entrant en contact avec Le Monde. En réponse, le Planning familial a déclaré : « Nous allons prendre en charge ce témoignage, dit Sarah Durocher, dans le but d’aider la victime et d’identifier si d’autres parties ont été victimes de ce même médecin, et peut-être d’autres médecins dans d’autres endroits, qui aimeraient nous en parler. »
« Positionnée les jambes sur les étriers, je l’ai ressenti contre moi »
Ce rassemblement de témoignages sera reçu via une adresse mail créée à cet effet par le cabinet Egaé, expert en violence sexuelle. C’est le même cabinet que le mouvement Emmaüs a utilisé concernant l’abbé Pierre. « Nous essaierons également de déterminer ce qui n’a pas fonctionné dans le traitement du témoignage d’Irène, ajoute Mme Durocher. Cela soulève la question du pouvoir des médecins sur les corps des femmes. Nous en sommes aux prémices d’une recherche. C’est une continuation de #metoo. Si cela permet, y compris aux femmes de cette génération, de s’exprimer, alors c’est positif. » La question demeure quant à combien seront en mesure de le faire, compte tenu de l’époque dont il est question.
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