Il y a environ douze ans, Robert F. Kennedy Jr – un ancien candidat à l’élection présidentielle américaine de 2024 qui soutient maintenant Donald Trump – traversait de sérieux troubles cognitifs. Il souffrait de perte de mémoire, de confusion mentale, entre autres symptômes. En raison de ces symptômes et de ses problèmes cardiaques récurrents, il craignait d’avoir une tumeur au cerveau. Cependant, en mai, le New York Times a signalé qu’un résidu de ver parasite avait été trouvé dans une partie de son cerveau. Malgré cela, ses médecins estimaient que la cause la plus probable de ses troubles était beaucoup moins dramatique. Kennedy a admis au journal que ces problèmes étaient probablement dus à sa consommation obsessionnelle de sandwiches au thon, un poisson reconnu pour sa haute contamination par le méthylmercure, un neurotoxique puissant. Comment un aliment aussi courant, même consommé en excès, peut-il avoir une telle ampleur de conséquences ? Un rapport de l’association Bloom, publié le mardi 29 octobre, apporte une série d’explications à ce » véritable scandale de santé publique « , selon les mots de sa présidente, Claire Nouvian.
L’organisation de protection des mers a procédé à l’analyse de près de 150 boîtes de thon et se sert des résultats obtenus pour demander une réduction du seuil de mercure autorisé dans ce poisson, qui est le plus consommé en Europe. Une boîte sur dix testées dépasse la limite fixée pour le thon frais, soit 1 milligramme par kg (mg/kg) en Europe. D’après Bloom, cette limite n’est pas destinée à protéger la santé publique, mais plutôt de maintenir le taux de conformité des poissons élevé afin de les garder sur le marché. En conséquence, Bloom soutient que les populations sont excessivement exposées, si l’on tient compte des limites sanitaires fixées par les autorités estimant la quantité de mercure que l’on peut ingérer chaque semaine sans risque pour la santé : 1,3 microgramme par kg de poids corporel par semaine (µg/kg pc/sem) selon l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA), et presque deux fois moins selon son équivalent américain, soit 0,7 µg/kg pc/sem.
Provenant de la combustion du charbon, de l’exploitation minière et de certaines activités industrielles, le mercure se disperse dans l’environnement et finit par atterrir dans les océans, où il est transformé en méthylmercure, et s’accumule dans les organismes marins, surtout en haut de la chaîne alimentaire. Il finit par se retrouver dans le corps de ceux qui consomment du thon, du requin, de l’espadon. Il peut alors causer des troubles cognitifs parfois graves.
D’après une étude de biosurveillance de Santé Publique France (SPF) parue en 2021, la population française est généralement contaminée. La dangerosité de cette contamination dépend des seuils de sécurité pris en compte. SPF a constaté que seulement 0,8 % des adultes, 2,1 % des femmes en âge de procréer et 2,4 % des enfants (de 6 à 17 ans) présentent un risque selon les taux de mercure trouvés dans leurs cheveux. Toutefois, si l’on utilise les seuils fixés par les autorités américaines, 27,4 % des adultes et 7,6 % des enfants de 6 à 17 ans en France seraient à risque. Malheureusement, l’étude ne fournit pas d’informations pour les enfants de moins de 6 ans, qui sont les plus susceptibles d’être affectés.
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