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Algérie : Visa étudiant difficile

« « Qu’est-il advenu de Moha, Aksel, Mourad, Mahdi… et d’autres jeunes du village ? » se demande Yazid, âgé de 45 ans, revenu d’Alger pour célébrer son mariage dans sa ville natale de Kabylie. Ce fonctionnaire est surpris de constater l’absence de jeunes qui, habituellement, prêtent main-forte lors d’événements locaux. Nombreux sont ceux qui sont « à l’étranger », principalement au Canada et en France. Un grand nombre de ces expatriés a acquis des diplômes en Algérie, ce qui leur donne un certain avantage pour obtenir un visa étudiant.

De nombreux jeunes font d’ailleurs cette demande avant la dernière année de leurs études, afin de gagner du temps. Selon Campus France, organisation s’occupant de l’information sur les études en France, 32 147 étudiants algériens se trouvaient dans le pays en 2023, soit une augmentation de 4 % par rapport à 2022. Ces étudiants représentent la deuxième plus grande communauté étudiante étrangère en France, derrière celle du Maroc.

Au centre Visa Facilitation Services (VFS), une entreprise indienne responsable du traitement des demandes de visa vers de nombreux pays, dont la France, située à Oued Smar, à 20 km à l’est du centre-ville d’Alger, des milliers de personnes se présentent chaque jour dans l’espoir d’obtenir le précieux visa. Ils sont souvent accompagnés de leurs parents venus d’Alger, Boumerdès, Béjaïa, Tizi Ouzou, Tipaza et d’autres régions voisines, comme en témoignent les plaques d’immatriculation.

En ce matin de septembre, Manal, âgée de 23 ans, qui a terminé ses études en langue française à l’Institut des langues de Bouzaréah et a reçu l’approbation d’une université parisienne pour un programme de post-graduation, déclare que « obtenir ce visa serait le couronnement de tous mes rêves ».

Des refus sans explication claire sont aussi courants. »

Amani, étudiante à la Sorbonne nouvelle, et Manal, acceptée à l’Université Paris-VIII, sont deux jeunes femmes qui vivent la frustration de la recherche du fameux visa étudiant. Toutes deux soulignent que sa garantie n’est plus aussi certaine qu’avant. Amani explique qu’elle a épuisé toutes ses forces pour obtenir un rendez-vous, se plaignant que cette étape qui devrait être simple, est en réalité la phase la plus pénible pour ceux qui cherchent à étudier en France.

Bien que leurs applications soient complètes, avec l’approbation de leurs universités d’accueil, un test de langue réussi, les frais de scolarité payés, une attestation de virement irrévocable d’un montant de 1 154 000 dinars, soit environ 8 000 euros, et un logement réservé, plusieurs de leurs camarades ont été rebutés par un refus sans justification claire.

Les autorités ne s’appuient que sur une phrase vague de bureaucratie : « Les informations fournies pour justifier les conditions de séjour sont incomplètes et/ou peu fiables ». Les rejets ne comprennent pas où se situe le « défaut » de leur application. Beaucoup conjecturent que ces refus sont en fait une stratégie des autorités françaises pour freiner l’afflux de jeunes diplômés algériens. Cependant, face à ces déceptions régulières, les demandeurs ne se découragent pas et font tout pour maximiser leurs chances.

En pratique, la demande pour poursuivre ses études dans une université en France doit passer par Campus France. Cette organisation assiste les étudiants à préparer leur projet académique. Le processus, qui dure neuf mois, commence le premier octobre sur la plateforme Campus France. Il comprend plusieurs étapes incluant le soumission du dossier sous format électronique et papier, le transfert aux universités sélectionnées, un test de langue française et un entretien. Les frais du dossier et du test linguistique doivent être payés à l’Institut français d’Alger ou à ses branches à Annaba, Constantine, Oran et Tlemcen.

Wassim, âgé de 17 ans, se sent confiant. « J’ai passé mon bac au Lycée Français Alexandre-Dumas de Ben Aknoun [situé aux hauteurs d’Alger]. Normalement, j’ai de bonnes chances d’obtenir le visa étudiant », dit-il innocemment. Il mentionne que sa famille possède déjà une maison en Île-de-France, ce qui facilite les démarches. Il reconnait cependant que certains de ses amis ont dû payer des prix élevés pour arriver à ce point.

« Ils ont dépensé environ 10 000 dinars pour le dossier et entre 12 000 et 19 000 dinars pour le test de langue [soit plus de 200 euros selon le taux de change officiel], en plus des frais de visa [99 euros], de l’AVI et des économies requises pour les premiers mois avant de trouver un travail à temps partiel », dit-il. Wassim, conscient de sa chance, souligne que le visa étudiant est très convoité, indépendamment des moyens financiers. « Certaines familles en Algérie vont même jusqu’à vendre des biens pour financer les études de leurs enfants en France. Elles voient ça comme un investissement dans leur avenir », conclut-il.

Lors des mois d’août et septembre, de nombreux jeunes ont essayé d’acquérir le visa étudiant. Les centres de traitement des demandes étaient surchargés pendant cette période. Des pays comme la France et le Canada sont très appréciés principalement pour des aspects linguistiques. Néanmoins, d’autres nations comme l’Allemagne, la Turquie, la Hongrie, l’Italie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis sont aussi prisés. Avec l’avènement des formations en ligne, la barrière linguistique n’est plus un obstacle majeur.

Comme Yazid, un jeune homme marié qui remarque que son village est maintenant rempli d’aînés, beaucoup en Algérie se posent la question si ces départs sont une opportunité ou une perte pour leur pays. « C’est une source de fierté de voir nos jeunes prospérer à l’étranger, mais combien d’entre eux vont revenir pour construire notre futur ici ? » s’interroge Yazid.

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