Michel Daunay, un médecin à la retraite, envisage de reprendre sa pratique dans le village de Châtres-sur-Cher, où il vit, en Loir-et-Cher. Pour lui, ce serait une façon de « rendre service » à la communauté de 1 100 résidents qui a perdu deux de ses médecins généralistes en juin et septembre, l’un partant pour l’hôpital de Romorantin-Lanthenay, et l’autre acceptant un poste salarié dans une localité voisine. Sa décision de redémarrer son cabinet à 76 ans n’a pas été difficile à prendre lorsqu’il a été approché par la communauté de communes du Romorantinais et du Monestois avec une proposition de salaire mensuel. « Les gens ont désespérément besoin d’un médecin », explique-t-il.
Ce projet de Daunay, anticipant l’initiative du premier ministre Michel Barnier de mobiliser les médecins retraités pour lutter contre le manque de services médicaux, est arrivé à point nommé. Cependant, le conseil départemental de l’ordre des médecins a initialement rejeté son idée, arguant que Daunay ne s’est pas conformé à l’obligation de formation continue au cours des trois dernières années. Après la consultation du conseil national de l’ordre, une nouvelle décision est attendue. Si l’avis est favorable, Daunay pourra reprendre son activité avec pour seule condition qu’il mette à jour ses connaissances médicales.
« On ne peut pas simplement abandonner la profession médicale du jour au lendemain », argue le revenant, doté d’un franc-parler caractéristique et un penchant pour le tutoiement, illustrant parfaitement l’image du médecin de village entièrement dédié à ses patients. Durant trente-huit ans, il s’est levé à six heures du matin et se couchait à minuit, sans vraiment avoir la chance de prendre des vacances. « J’ai beaucoup sacrifié », avoue-t-il. L’incident le plus inhabituel de sa carrière ? Il s’agit du jour où il a dû amputer la jambe d’un agriculteur qui s’était fait prendre dans une machine, utilisant pour cela la scie à viande de la ferme, généralement utilisée pour découper le cochon. « L’homme est toujours en vie, j’ai eu l’occasion de le revoir récemment », déclare le médecin urgentiste formé.
« Je suis presque certain d’être submergé »
Comme on pourrait s’y attendre, Michel Daunay exprime sa tristesse face à la crise que traverse la médecine libérale en milieu rural : « Les jeunes médecins sont soit attirés par les incitations financières et s’établissent là où elles sont offertes, soit ils cherchent un travail de bureau qui commence à 9 heures et se termine à 18 heures. » En comparaison, lui ne travaille que deux jours par semaine, avec vingt-cinq rendez-vous par jour. « Mais je pressens que je serai dépassé, car la demande est énorme. »
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