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Renaudot: Aucune leçon Matzneff

La polémique Matzneff, qui concerne des accusations de viol sur mineurs, a émergé en 2020 après la sortie du livre Le Consentement de Vanessa Springora, publié chez Grasset. L’écrivain de quatre-vingt ans a encore des amis au sein de la communauté littéraire malgré les accusations. Le prestigieux prix Renaudot lui avait été accordé en 2013, mais le jury, critiqué pour sa complaisance, est resté silencieux. Parmi les membres du jury se trouvait Christian Giudicelli, ami et éditeur de Matzneff et partenaire de ses voyages en Asie au cours desquels ont eu lieu des actes de pédocriminalité; Giudicelli est décédé en 2022. Le seul à avoir quitté le jury est le journaliste Jérôme Garcin.

Depuis 2020, les membres du jury Renaudot ont été remplacés par Stéphanie Janicot et Cécile Guilbert en 2021, et Mohammed Aïssaoui en 2023. Cependant, le prix Renaudot conserve ses tendances néfastes, continuant à favoriser ses amis. En 2022, Simon Liberati, un proche collaborateur du juré Frédéric Beigbeder, a remporté le prix pour son livre Performance, également publié chez Grasset. Le Prix Renaudot semble garder dans son essence un penchant pour la transgression.

En 2023, l’audacieux choix de récompenser Ann Scott a porté ses fruits : les ventes de son livre Les Insolents, publié par Calmann-Lévy, sont passées de moins de mille à plus de 67 000 exemplaires jusqu’à aujourd’hui (selon GfK). Cette année, grâce à l’enthousiasme du juré historique J. M. G. Le Clézio, L’Eden à l’aube, écrit par le Palestinien Karim Kattan et publié par la petite maison d’édition tunisienne Elyzad, a trouvé sa place jusqu’aux deuxième sélections.

Cécile Guilbert, après avoir soutenu Murnau des ténèbres de Nicolas Chemla jusqu’à la finale il y a trois ans, affirme qu’elle ne ressent aucune influence particulière des maisons d’éditions pour favoriser certains titres. Elle assure : « Nous attire l’attention du public sur des œuvres que nous sommes parfois seuls à remarquer ». Mohammed Aïssaoui, également critique littéraire au journal Le Figaro, insiste sur la nécessité de résister à la pression amicale, professionnelle et éditoriale. Il a établi pour règle de se garder d’écrire des critiques sur les livres sélectionnés pour le Prix Renaudot et de ne pas se contenter de présenter les romans publiés par son éditeur, Gallimard.

Maud Simonnot, qui a passé de nombreuses années en tant qu’éditrice chez Gallimard et qui est désormais directrice littéraire au Seuil depuis mai, souligne qu’il est difficile de ne pas remarquer la sur-représentation de certains éditeurs dans les lauréats des grands prix littéraires. Commentant l’absence de titres de son éditeur dans les sélections du Renaudot et du Goncourt cette année, elle fait remarquer un fonctionnement problématique de certains prix littéraires : « La difficulté de faire figurer des titres sur les listes est bien réelle quand aucun auteur du jury n’est issu de notre maison d’édition».

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