« Hélas, nous avons une mauvaise nouvelle à partager. Victoire est infestée de poux. » C’est le 9 septembre, une semaine après la rentrée scolaire, et Grégoire, dépité, rentre de la chambre de sa petite fille de quatre ans. La soirée s’annonçait agréable. Dès notre arrivée, Victoire nous avait attrapé la main pour nous emmener en visite dans l’appartement de ses deux pères, Grégoire, âgé de 40 ans et responsable RH, et Gaëtan, 41 ans et commercial (les prénoms ont été changés pour préserver leur anonymat, à leur demande).
Victoire nous avait guidés à travers tous les recoins de leur dressing. Nous avions parlé de sa journée autour de légumes, lu Les Aristochats sur le canapé du salon. Tout s’était déroulé sans accroc. Nous avions même eu la chance de parcourir l’album photo qui racontait sa venue au monde, via la gestation pour autrui (GPA), aux Etats-Unis. Mais malheureusement, nous avions passé une heure à proximité les uns des autres, avec des invités surprises. « Au moins, nous savons recevoir! » Gaëtan avait blagué.
Grégoire se gratte la tête, même si elle est dénuée de cheveux. Ils ont déjà vécu cette histoire de poux l’année précédente : « Un véritable cauchemar ». Au-delà des virus ininterrompus qui se propageaient dans la classe, l’enseignante de leur fille en maternelle ne leur avait pas plu, la définissant comme une « gardienne inflexible et homophobe ». Similaire à leur quartier huppé de Paris. « Ce n’est pas forcément négatif, mais c’est comme être dans un zoo, on est observé », explique Gaëtan. Mais Grégoire n’est pas d’accord : « Bien sûr que c’est négatif! »
Prochaine étape : la banque.
Lors de la légalisation du mariage pour tous en 2013, leur désir de devenir parents a surgi. Étant des hommes homosexuels, leurs options étaient limitées. L’idée d’adoption fut rapidement abandonnée. Gaetan se souvient d’un documentaire où, à la fin, une famille gay n’avait toujours pas d’enfant adopté, illustrant un certain préjudice sociétal qui l’avait énormément choqué.
La GPA était leur autre alternative, bien qu’illégale en France, elle était réalisable à l’étranger. Cependant, cela soulevait deux problématiques : financières et éthiques. Comme l’a plaisanté Grégoire, même s’ils étaient assez privilégiés, ils n’étaient pas assez riches pour débourser 150 000 dollars comme ça. Ils ont dû donc faire un détour par la banque. Leur prétexte pour l’emprunt était de financer leur extravagant mariage. Ces anecdotes amusantes qu’ils ont racontées étaient loin de répondre aux questions de la banquière. Ils ont réussi à obtenir le prêt et ont entamé la procédure. Finalement, ils se sont vraiment mariés, mais sans la pompe ni l’invitation.
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