« Arrêtez les violences routières ». C’est ainsi que s’intitule l’appel à témoignages initié par la Fédération des utilisateurs de vélos (FUB) après la tragédie de Paul Varry. Âgé de 27 ans, ce cycliste a été délibérément écrasé, selon les premières informations de l’enquête, par un chauffeur de SUV roulant sur la piste cyclable, le 15 octobre à Paris.
Cet incident a permis de mettre en lumière le sujet des « violences routières » dans un débat public majoritairement axé jusqu’à présent sur les problèmes d’infrastructure ou d’écologie. Olivier Schneider, co-président de la FUB, semble étonné de l’ampleur de ce phénomène. Son organisation a recueilli 818 récits d’incidents vécus par des cyclistes en seulement deux jours. « Nous plaidons depuis longtemps pour des mesures visant à réduire les risques sur la route, mais nous n’avons jamais traité spécifiquement les actes de violence délibérés jusqu’à présent », note-t-il.
Les autorités aussi ont commencé à prendre conscience de l’importance de cette problématique, qui va au-delà du traditionnel appel à « partager la route ». Le 21 octobre, des groupes de cyclistes ont rencontré François Durovray, le ministre des transports, qui était très attendu sur ce sujet après avoir mis quatre jours à réagir à la mort de Paul Varry. Il a annoncé à cette occasion la création d’une « mission contre les violences routières », qui sera dirigée par une « personne qualifiée ».
L’utilisation croissante des routes par les cyclistes dans les zones urbaines encombrées a conduit à une montée des conflits. Ceux-ci se produisent entre les cyclistes, les piétons dont les zones sécurisées sont parfois sacrifiées pour les projets de vélo, et les conducteurs de voitures qui ont du mal à perdre leur monopole sur les routes. Néanmoins, les données de sécurité routière sont sans équivoque et indiquent que les voitures et leurs conducteurs sont les plus souvent responsables des accidents.
Selon l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR), le nombre de cyclistes tués a atteint 221 en 2023, soit une augmentation de 18% par rapport à 2019. Parallèlement, le nombre de piétons tués a diminué de 10% en 2023, pour atteindre 439, par rapport à 2019. Dans 72% des cas où des piétons ou des cyclistes sont tués dans un accident impliquant un tiers, le tiers est généralement un véhicule de tourisme ou utilitaire.
L’augmentation du nombre de victimes est due en partie à la hausse notable de l’utilisation du vélo, qui a bondi de 20% entre 2020 et 2021, d’après les données de la plateforme nationale des fréquentations. Cette tendance, encouragée par le gouvernement pour des raisons environnementales, a été stimulée par le lancement, en 2018, par Elisabeth Borne, alors ministre des Transports, d’un plan de 465 millions d’euros sur quatre ans en faveur du vélo. Ce plan a été renforcé lors de sa nomination à Matignon, avec la promesse d’investir 1,25 milliard d’euros entre 2023 et 2028.