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24 octobre 2024 23 h 44 min

Pesticides réduisent populations d’insectes

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Depuis près de trois décennies, l’extinction des insectes est en cours et cela dans un relatif anonymat. Ces créatures, souvent considérées comme un fléau, ne suscitent pas la même sympathie que les mammifères, et sont donc rarement l’objet d’efforts de conservation. Diverses recherches scientifiques suggèrent qu’entre 70% et 80% des insectes ont disparu dans les zones densément peuplées au cours des dernières décennies.

Des études récentes, publiées dans la revue Science le 24 octobre, indiquent que l’impact des produits agrochimiques sur cette diminution pourrait être plus significatif qu’on ne le pensait. Cette recherche, menée par des scientifiques du Laboratoire européen de biologie moléculaire (EMBL), a révélé que certains pesticides, dont on pensait qu’ils étaient anodins, pourraient en fait interférer avec le développement des insectes.

Pour arriver à cette conclusion, ils ont étudié 1024 produits agrochimiques en les testant sur des mouches Drosophila et leurs larves. Ils ont supervisé leur croissance, observé leur comportement et évalué leur capacité de survie tout au long de leur vie. Le constat est que 57% des produits chimiques examinés ont modifié le comportement des insectes.

« Nous avons constaté que plus de la moitié des produits entraînent des changements dans les fonctions physiologiques des insectes et ont des effets sublétaux, même lorsque les larves sont exposées à des doses écologiquement faibles », déclare Lautaro Gandara, auteur principal de l’étude.

« C’est un facteur aggravant « .

Les impacts sublétaux englobent toutes les conséquences négatives qui ne provoquent pas de décès, tels que des altérations de la reproduction ou de la mobilité. Des scientifiques de l’EMBL ont prouvé que certains pesticides, qui incluent non seulement les insecticides, mais aussi les fongicides, herbicides et parasiticides, peuvent influencer la capacité de déplacement des insectes, réduisant ainsi leur potentialité prédatrice.

Lorsque ces facteurs sublétaux sont pris en considération, certains composés auparavant perçus comme inoffensifs se sont avérés nocifs pour les insectes. Justin Crocker, Co-auteur de l’étude, cite comme exemple la dodine, un fongicide à base de guanidine, « Elle n’affecte pas directement les insectes adultes, mais nous avons prouvé qu’elle modifie substantiellement le comportement des larves. »

Colette Bertrand, chercheuse à l’Institut national de la recherche agronomique, qui n’a pas contribué à l’étude, remarque « l’étendue de cette étude est impressionnante, tant par le nombre de molécules testées, que par la considération de facteurs aggravants comme les combinaisons de molécules. Cela renforce la crédibilité de ces travaux. » Cette étude inédite pourrait changer l’évaluation de la toxicité de certains pesticides. « Les méthodes traditionnelles testent en priorité la létalité, » ajoute la chercheuse, « Mais ces dernières années, nous avons compris l’importance de prendre en compte les effets sublétaux qui influencent la capacité de survie des insectes. »

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