Ce live a compté avec la participation de Céline Bouanchaud, Glenn Cloarec, Romain Del Bello, Jérémie Lamothe, Jean-Philippe Lefief, Solène L’Hénoret et Leslie Souvanlasy. Vous pouvez lire toutes nos publications, y compris les analyses et les reportages sur le conflit en Ukraine.
Voici quelques faits saillants : à Kiev, le « programme de victoire » de Zelensky attire des critiques. Dans une autre actualité marquante, l’annonce du déploiement de troupes nord-coréennes représente une échelle conflictuelle jamais atteinte jusqu’à présent.
Il existe aussi un débat entre Biden, Macron, Scholz et Starmer sur la question de l’invitation de l’Ukraine à rejoindre l’OTAN. De plus, sur Telegram, on remarque l’émergence des messagers russes de la guerre.
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Notamment, on se pose la question : comment les Moscovites et les Kieviens utilisent-ils des drones ?
Au bout de plusieurs mois, la guerre des drones entre la Russie et l’Ukraine s’est largement intensifiée. D’après une étude publiée en mai 2023 par un groupe de réflexion britannique spécialisé en défense, les Ukrainiens connaissent des pertes d’environ 10 000 drones chaque mois sur le champ de bataille, soit une moyenne de plus de 300 chaque jour. À titre comparatif, l’armée française détient un peu plus de 3 000 drones dans ses stocks.
Les Ukrainiens et les Russes exploitent principalement de petits UAV (unmanned aerial vehicle, en anglais), d’origine civile, à un prix abordable et disponibles en grande quantité. Ces derniers sont principalement utilisés pour surveiller le terrain de combat et guider les troupes ou les tirs d’artillerie. Certains drones sont même modifiés pour porter de petites charges explosives, qui sont ensuite larguées sur des tranchées ou des véhicules blindés.
Les drones-kamikazes, bien que moins nombreux, ont aussi un rôle crucial. Ces UAV, équipés de charges explosives, sont lancés sans objectif spécifique au-dessus de la ligne de front. Les drones russes Lancet-3 et les Shahed-136 iraniens sont utilisés par Moscou. Malgré l’absence d’une armada significative, l’Ukraine défie son adversaire avec des véhicules maritimes téléguidés, des kayaks de petites tailles remplis de dynamiques (450 kg de TNT).
La valeur des drones dans leurs missions est reconnue tant par les Ukrainiens que par les Russes, qui se sont adaptés pour soutenir leurs troupes à long terme, non seulement en acquérant massivement des drones civils, mais aussi en établissant des capacités de production indigènes. L’industrie nationale ukrainienne, qui faisait ses premiers pas au commencement de la guerre du Donbass il y a une décennie, s’est progressivement renforcée. Fin août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a révélé qu’une réplique du drone russe Lancet avait été créée et serait prochainement lancée sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.
En raison des sanctions occidentales limitant son approvisionnement en composants électroniques, la Russie rencontre plus de difficultés. Cependant, selon les services de renseignement américains, Moscou aurait débuté la construction d’une usine dans la zone économique spéciale d’Alabouga pour y produire des drones-kamikazes de conception iranienne, similaires aux Shahed-136.
Qu’en est-il des réserves de missiles russes ?
Évaluer l’état actuel des stocks de missiles de l’armée russe est compliqué, voire impossible. Les services de renseignement ukrainiens fournissent régulièrement des informations à ce sujet, mais leurs évaluations sont discutables.
D’après Andri Ioussov, un porte-parole du service de renseignement du ministère de la défense (GUR), qui a été cité par Liga.net, l’armée russe avait en sa possession 2 300 missiles balistiques ou de croisière avant le conflit, et plus de 900 restaient à la phase initiale de l’année. Selon le même porte-parole, cela s’ajoute à environ dix mille missiles anti-aériens S-300, ayant une portée d’environ 120 kilomètres, ainsi qu’une importante réserve de S-400, une version plus récente avec une portée trois fois plus grande. En août, Vadym Skibitsky, le second en commandement au sein du GUR, proposait qu’il y ait 585 missiles d’une portée de plus de 500 kilomètres.
Quant à la capacité de production, elle aurait augmenté à environ cent missiles balistiques ou de croisière par mois, selon plusieurs spécialistes. En octobre, le GUR estimait cette production à 115 unités.
La Russie aurait également acquis des missiles à courte portée de l’Iran et de la Corée du Nord, et continuerait à en faire l’acquisition. L’agence Reuters, citant plusieurs sources iraniennes, rapporte que 400 missiles iraniens de la famille Fateh-110 (avec une portée de 300 à 700 kilomètres) auraient été fournis depuis janvier, moment probable de la mise en place d’un accord. Le montant de missiles nord-coréens obtenus par la Russie est inconnu, cependant, 24 ont été tirés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, selon le procureur général Andriy Kostin. Les experts estiment probablement qu’il s’agit de KN-23 et KN-24 avec une portée d’environ 400 kilomètres après avoir examiné les restes et les trajectoires.
Qu’en est-il des avions de combat F-16 ?
L’Ukraine a reçu ses premiers avions de chasse F-16 de fabrication américaine au début du mois d’août, une demande que Kiev avait formulée depuis le début du conflit. Pour le commandant des forces armées ukrainiennes, Oleksandr Syrsky, l’efficacité de ces avions modernes pourrait contribuer à préserver des vies militaires ukrainiennes. Ruslan Stefanchuk, président du parlement, a salué l’arrivée de ces avions de combat qui pourraient « considérablement renforcer nos capacités ».
Cependant, le 30 août, l’état major en Ukraine a annoncé qu’un de ces avions s’était écrasé et que le pilote avait péri en repoussant une attaque importante de missiles russes sur le territoire ukrainien quelques jours plus tôt. Depuis le début de l’invasion russe en février 2022, Kiev a continuellement sollicité la livraison des F-16 américains. En août 2023, le président américain Joe Biden a approuvé le déploiement de ces avions en Ukraine, bien que les États-Unis n’aient fourni aucun de leurs propres appareils.
A l’horizon 2028, Kiev devrait recevoir 95 avions promis par ses alliés : trente de la Belgique, vingt-quatre des Pays-Bas, vingt-deux de Norvège et dix-neuf du Danemark. La Suède s’est également engagée, en mai, à envoyer un avion de type Awacs, essentiel à l’acquisition de renseignement et à la coordination d’opérations avec les F-16.
En outre, les pilotes ukrainiens doivent être formés pour piloter ces avions de combat américains. Onze pays alliés se sont engagés à prendre en charge leur formation.
Quel est donc le soutien militaire que les alliés offrent à Kiev ?
Deux années après le début des conflits majeurs, l’aide occidentale à Kiev semble faiblir : la contribution nouvellement engagée de août 2023 à janvier 2024 a diminué comparativement à la même période de l’année qui la précède, d’après le dernier rapport de l’Institut Kiel publié en février 2024. Cette situation pourrait continuer avec la difficulté rencontrée par le Sénat américain pour approuver des aides et l’Union européenne (UE) ayant eu du mal à faire adopter une aide de 50 milliards le premier février 2024 en raison de l’opposition hongroise. Cependant, ces deux paquets d’aide n’ont pas encore été intégrés dans le dernier bilan réalisé par l’Institut Kiel, qui s’est terminé en janvier 2024.
Les données de l’institut allemand indiquent une réduction du nombre de donateurs concentrés autour d’un groupe de pays : les États-Unis, l’Allemagne, les pays du nord et de l’est de l’Europe se sont engagés à fournir une aide financière importante ainsi qu’un armement sophistiqué. En tout, depuis février 2022, les pays soutenant Kiev ont promis une aide d’au moins 276 milliards d’euros sur le plan militaire, financier et humanitaire.
Dans l’absolu, les nations les plus prospères se sont révélées les plus généreuses. Les États-Unis sont les premiers donateurs avec plus de 75 milliards d’euros annoncés, dont 46,3 milliards en aide militaire. Les pays de l’Union européenne ont promis des aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et des aides communes provenant des fonds de l’UE (93,25 milliards d’euros), représentant un total de 158,1 milliards d’euros.
En mettant en relation les contributions à l’aide avec le produit intérieur brut (PIB) de chaque pays donateur, un nouvel ordre apparaît. Les États-Unis dégringolent à la vingtième place, ne contribuant qu’à 0,32 % de leur PIB. C’est nettement inférieur à ce que fournissent certains pays qui jouxtent l’Ukraine ou des anciennes nations de l’Union soviétique. L’Estonie domine la liste des aides en proportion de son PIB à 3,55 %, suivie du Danemark (2,41 %) et de la Norvège (1,72 %). Les cinquièmes et sixièmes places sont occupées par la Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %). Ces trois pays baltes, ayant tous des limites territoriales avec la Russie ou son alliée la Biélorussie, figurent parmi les donateurs les plus prodigues depuis le début de la crise.
Au classement en termes de pourcentage du PIB, la France arrive à la vingt-septième position, ayant promis 0,07 % de son PIB, juste après la Grèce (0,09 %). L’aide délivrée par la France connait une baisse continue depuis le début de l’occupation de l’Ukraine par la Russie – la France se classait vingt-quatrième en avril 2023, et à la treizième position en été 2022.
Que comprend-on des conflits frontaliers entre l’Ukraine et la Pologne?
Les mois précédents ont été marqués par des tensions entre l’Ukraine et la Pologne, en grande partie dues au transit de céréales ukrainiennes. Au coeur des tensions, au printemps 2022, des « corridors de solidarité » avaient été créés par la Commission européenne pour permettre l’exportation et la vente de produits agricoles ukrainiens, sans taxes douanières, vers l’Afrique et le Moyen-Orient. Cependant, environ la moitié de ces céréales trouvent leur chemin ou terminent leur trajet dans l’Union européenne, selon la Fondation Farm, une organisation de réflexion sur des problématiques agricoles mondiales. Ces céréales sont vendues à des coûts bien inférieurs à ceux du blé produit localement, en particulier dans les pays de l’Europe centrale.
De ce fait, plusieurs nations, dont la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie, ont mis un terme à leurs importations de céréales ukrainiennes en avril 2023, invoquant une déstabilisation de leur marché interne et une menace pour les revenus de leurs agriculteurs. L’embargo avait été accepté par Bruxelles, à condition qu’il n’entrave pas le transit vers d’autres pays et qu’il n’excède pas une période de quatre mois. Malgré cela, Varsovie a choisi de maintenir ses frontières fermées aux céréales ukrainiennes à la fin de l’été, bien que Bruxelles ait jugé cela inutile, ses analyses montrant que « les perturbations des marchés nationaux des céréales n’étaient plus présentes ».
Depuis un moment, les agriculteurs de Pologne ont mis en place un blocus à la frontière avec l’Ukraine, empêchant l’entrée de camions ukrainiens sur leur sol national. Leur revendication est l’instauration d’un « embargo total » sur les produits agricoles et alimentaires provenant d’Ukraine. Ils protestent à cause de l’augmentation massive de leurs coûts de production pendant que leurs silos et entrepôts sont pleins et les prix à leur niveau le plus bas. Le président ukrainien a exprimé au début de 2024 que ce blocus à la frontière polonaise révèle une « dégradation de la solidarité » envers son pays et a donc demandé des discussions avec la Pologne. Il a aussi déclaré que « seule Moscou est satisfaite » de ces tensions, en critiquant la « montée de slogans pro-Poutine manifestes ».
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