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21 octobre 2024 9 h 49 min

Russie attaque Kiev avec drones

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Consultez tous nos écrits, études et reportages sur le conflit ukrainien. Les faits. Le « plan de victoire » de Zelensky à Kiev rencontre une certaine opposition. Clarification. L’introduction anticipée de troupes nord-coréennes incite à une escalade sans précédent. Les faits. Biden, Macron, Scholz et Starmer sont divisés sur la proposition d’incorporer l’Ukraine à l’OTAN. Investigation. Les propagateurs russes de la guerre sur Telegram. Pour plus de détails, appelez une ligne.

Comment Moscou et Kiev font-ils usage de drones ? Depuis quelques temps, l’engagement de drones entre la Russie et l’Ukraine a atteint une dimension sans précédent. Un rapport publié en mai 2023 par un institut britannique spécialisé dans la défense mentionnait que les Ukrainiens perdaient environ 10 000 drones par mois sur le terrain, soit plus de 300 par jour. Pour mettre en perspective, l’armée française possède un peu plus de 3 000 drones dans son arsenal.

Les Ukrainiens et les Russes font principalement appel à de petits UAV (véhicules aériens sans pilote, en anglais) d’origine civile, économiques et largement disponibles. Leur fonction est de surveiller le terrain de conflit et de diriger les troupes ou les tirs d’artillerie. Certains sont également modifiés pour transporter de petites charges explosives qui sont larguées sur des tranchées ou des véhicules blindés.

Bien qu’en nombre réduit, les drones-kamikazes conservent un rôle clé. Équipés d’une charge détonante, ces Véhicules Aériens Non Habités sont déployés par-dessus la ligne de front sans cible préalablement fixée. La Russie fait appel aux drones russes Lancet-3, mais également aux drones Shahed-136, produits en Iran. Dénuée d’une marine militaire respectable, l’Ukraine provoque son adversaire avec ses engins maritimes non habités, des kayaks miniatures teleguidés et pourvus d’explosifs (450 kilos de TNT).

Manifeste de l’importance des drones pour leurs actions militaires, les Russes et les Ukrainiens ont organisé des moyens pour approvisionner leurs soldats sur une longue durée, pas seulement en acquérant en large quantité des drones civils sur le marché mais aussi en instaurant des capacités de fabrication locales. Initialement balbutiante au commencement de la guerre du Donbass, il y a une décennie, l’industrie nationale ukrainienne a depuis lors gagné en force. Fin août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a annoncé la conception d’une réplique du drone russe Lancet, qui serait bientôt envoyée sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.

Handicapée par les sanctions occidentales qui restreignent son approvisionnement en composants électroniques, la Russie est donc plus en difficulté. Cependant, selon les services de renseignement américains, Moscou aurait commencé à construire une usine dans la zone économique spéciale d’Alabouga, avec pour objectif d’y produire des drones-kamikazes d’origine iranienne, tels que les Shahed-136.

Qu’en est-il des réserves de missiles russes ?
C’est un véritable défi, si ce n’est un impossible, d’établir l’état actuel des stocks de missiles de l’armée russe. Les services de renseignement ukrainiens publient régulièrement des informations à ce sujet, mais leurs évaluations sont discutables.

D’après Andri Ioussov, un représentant de la Direction Générale du Renseignement du Ministère de la Défense (GUR), cité par Liga.net, l’armée russe avait une réserve de 2300 missiles, balistiques ou de croisière, avant le conflit et conservait plus de 900 en stock au début de l’année. Ce dernier chiffre est augmenté par une dizaine de milliers de missiles antiaériens S-300, d’une portée d’environ 120 kilomètres, et une quantité significative de missiles S-400, une version plus récente avec une portée triplée. En août, Vadym Skibitsky, le second du GUR, a mis en avant un total de 585 missiles ayant une portée plus grande de 500 kilomètres.

En termes de capacité productive, selon plusieurs spécialistes, on estime à présent qu’ils peuvent produire une centaine de missiles balistiques ou de croisière chaque mois. En octobre, le GUR estimait ce nombre à 115.

Par ailleurs, la Russie aurait acquis des missiles de courte portée en Iran et en Corée du Nord et continuerait de le faire. D’après l’agence Reuters, qui cite plusieurs sources iraniennes, 400 missiles iraniens de la classe Fateh-110 (300 à 700 kilomètres) lui ont été livrés depuis janvier, date de la conclusion d’un accord. On ne sait pas combien de missiles nord-coréens la Russie a acheté, mais 24 ont été lancés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, selon le procureur général, Andriy Kostin. D’après l’analyse des experts des restes et des trajectoires, il est possible qu’il s’agisse de KN-23 et KN-24 avec une portée d’environ 400 kilomètres.

Et les avions de combat F-16?

Au début du mois d’août, l’Ukraine a accueilli ses premières flottes de chasseurs F-16, des vaisseaux militaires fabriqués aux États-Unis. Kiev a demandé ces avions depuis le début du conflit. Selon le commandant des forces armées, Oleksandr Syrsky, l’exploitation efficace de ces machines modernes permettra la protection des vies militaires ukrainiennes. Le président du Parlement, Ruslan Stefanchuk, s’est réjoui de l’arrivée de ces vaisseaux militaires qui peuvent grandement améliorer nos capacités.

Cependant, le 30 août, le quartier général ukrainien a déclaré qu’un de ces avions s’était écrasé, tuant le pilote, alors qu’il repoussait une attaque de missiles russes sur l’ensemble du territoire ukrainien quelques jours plus tôt. Au début du conflit russo-ukrainien en février 2022, Kiev s’est battu sans cesse pour obtenir des F-16 américains. En août 2023, le président américain Joe Biden a approuvé le déploiement de ces machines de fabrication américaine en Ukraine, bien que les États-Unis ne fournissent aucun de leurs propres avions.

D’ici 2028, 95 avions ont été promis à Kiev par ses alliés : trente de la Belgique, vingt-quatre des Pays-Bas, vingt-deux de Norvège et dix-neuf du Danemark. En fin de mai, la Suède s’est également engagée à envoyer un avion de type Awacs, vital pour le recueil de renseignements et la coordination des actions éventuelles avec les F-16.

De plus, les pilotes ukrainiens doivent être formés pour piloter ces vaisseaux militaires américains. Onze pays alliés de Kiev se sont engagés à prendre en charge la formation des pilotes. Quel type de support militaire ses alliés fournissent-ils à Kiev?

Deux ans après le commencement des hostilités massives, l’élan de l’appui occidental à Kiev décroît. Les aides récemment allouées entre août 2023 et janvier 2024 ont diminué comparées à la même durée de l’année précédente, selon le rapport dernière de l’Institut Kiel, sorti en février 2024. Le Sénat américain lutte pour approuver plus d’aides, par ailleurs, l’adoption par l’Union Européenne (UE) d’une assistance de 50 milliards le 1er février 2024 a été entravée par la Hongrie. A remarquer que ces deux aides supplémentaires n’ont pas encore été inclues dans le décompte final de l’Institut Kiel, qui s’achevait en janvier 2024.

Selon les données fournies par l’Institut allemand, le nombre d’aires fonds diminue et se rationnalise autour d’une sélection de pays, incluant les États-Unis, l’Allemagne, et les pays du nord et de l’est de l’Europe. Ces derniers offrent à la fois une forte assistance financière et des armes de haute technologie. En somme, depuis février 2022, les pays en faveur de Kiev ont promis au moins 276 milliards d’euros en soutien militaire, financier et humanitaire.

En termes absolus, les pays les plus riches se sont avérés les plus magnanimes. Les États-Unis sont de loin les premiers à apporter de l’aide, avec plus de 75 milliards d’euros annoncés, dont 46,3 milliards en assistance militaire. Les pays de l’Union européenne ont offert à la fois des aides bilatérale (64,86 milliards d’euros) et des aides communes des fonds européens (93,25 milliards d’euros), atteignant un total de 158,1 milliards d’euros.

Lorsqu’on compare les contributions au Produit Intérieur Brut (PIB) des différents pays donateurs, le tableau se modifie. Les États-Unis descendent au vingtième poste (0,32% de leur PIB), bien après certaines nations adjacentes à l’Ukraine ou de vieilles républiques soviétiques alliées. En tête de la liste, au regard du PIB, on trouve l’Estonie qui contribue à hauteur de 3,55 %, suivie par le Danemark (2,41 %) et la Norvège (1,72 %). La Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %) complètent le top 5. Les trois États baltes, qui partagent tous des frontières avec la Russie ou son alliée, la Biélorussie, sont parmi les principaux donateurs depuis le commencement du conflit.

Concernant le classement basé sur le pourcentage du PIB, la France s’affiche au vingt-septième rang, ayant déployé 0,07% de son PIB, juste après la Grèce (0,09%). Les aides apportées par Paris diminuent continuellement depuis l’initiation de l’invasion de l’Ukraine par la Russie – la France était au vingt-quatrième rang en avril 2023 et au treizième en été 2022.

Qu’avons-nous appris sur les tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne?

Depuis quelque temps, les tensions entre la Pologne et l’Ukraine sont exacerbées, principalement à cause du transit des céréales ukrainiennes. Au printemps 2022, une série de « voies de solidarité » ont été mises en œuvre par la Commission européenne afin de faciliter l’expédition et la vente sans imposition de produits agricoles ukrainiens vers l’Afrique et le Moyen-Orient. Cependant, environ 50% des céréales ukrainiennes transitent ou finissent leur voyage dans l’Union européenne, principalement selon la Fondation Farm, une organisation de réflexion à propos des enjeux agricoles mondiaux. Ces céréales sont vendues à des prix bien plus bas que le blé cultivé en Europe, notamment en Europe Centrale, ce qui constitue un point de discorde.

La Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont donc décidé de bloquer leurs importations en avril 2023, arguant que ces céréales déstabilisent leur marché local, et par conséquent, portent préjudice à leurs agriculteurs. Bruxelles a accepté cet embargo, sous réserve qu’il n’entrave pas le transit vers d’autres pays et qu’il ne dure que quatre mois. A la fin de l’été, la Pologne a choisi de maintenir sa frontière fermée aux céréales ukrainiennes, arguant que le problème sous-jacent persiste, alors que Bruxelles estimait que l’embargo avait cessé d’être nécessaire étant donné que ses analyses montraient qu’il n’y avait plus de perturbation des marchés nationaux pour les céréales.

Depuis la bordure entre l’Ukraine et la Pologne, les cultivateurs polonais empêchent les camions ukrainiens de franchir leur territoire national. Ils réclament un « interdit absolu » sur les marchandises ukrainiennes agricoles et nutritionnelles. Ils dressent le constat de l’énorme hausse de leurs frais de production pendant que les silos et dépôts sont surchargés et que les tarifs sont à leur plus faible niveau. Le chef d’État ukrainien a conjecturé au commencement de 2024 que l’encerclement de la bordure polonaise traduisait une « détérioration de la solidarité » envers sa nation, et a sollicité des négociations avec la Pologne. « Uniquement Moscou se satisfait » de ces frictions, a-t-il de plus certifié, condamnant « l’émergence de slogans ouvertement en faveur de Poutine ».