Newt Gingrich aime discuter de lui-même. Ecouter ses histoires revient à écouter un prédateur raconter ses plus grandioses festins du passé. Il vieillit, mais l’ancien président de la Chambre des représentants (1995-1999) demeure aussi vif que jamais, même dans son bureau moderne d’Arlington (Virginie), comme une plante succulente qui prospère en milieu hostile. Face à l’escalade de l’extrémisme qui semble faire perdre à la droite américaine ses valeurs et sa mémoire, Gingrich continue de se vanter, dans les médias conservateurs, d’une combinaison de virtuosité intellectuelle et d’un goût adolescent pour la confrontation.
« Je suis la même personne à 80 ans que lorsque j’avais 8 ans. Chaque matin, je me réveille en pensant à comment je peux influencer le pays. Même enfant, j’ai toujours eu une compréhension adulte de la vie. J’ai assisté à la mort de mon arrière-grand-père lorsque j’avais 4 ans, ce qui m’a aidé à comprendre la finalité de l’existence, que j’ai depuis cherché à remplir. La seconde épouse de mon père biologique m’a une fois demandé pourquoi je ne jouais pas dehors avec les autres enfants, mais j’étais trop occupé avec un livre sur la paléontologie des vertébrés. » À l’âge de 11 ans, Gingrich s’est rendu devant le conseil municipal de Harrisburg (Pennsylvanie) pour plaider pour l’ouverture d’un zoo, proposant même un plan de financement. Est-ce de là que provient sa vision de la politique comme un environnement nécessitant un manuel de survie, un couteau aiguisé pour la chasse, et de très robustes chaussures de marche ?
Newt Gingrich fut parmi les premiers à soutenir le passage de Donald Trump de la vie d’affaires à la politique. En 2015, la notoriété de Trump, un magnat de l’immobilier new-yorkais qui était alors une figure télévisuelle, a été critiquée par l’élite de Washington. Selon Gingrich, Trump avait intuitivement compris que la gauche était étrange et finalement vouée à l’échec complet. Il reconnut la bravoure de Trump pour ses attaques frontales et son habilité comme vendeur. Bien que Gingrich soit un fervent passionné d’histoire, particulièrement de la seconde guerre mondiale, et Trump pour la richesse, la lutte et son handicap au golf, ils partagent une chose en commun: la transgression. Chaque homme a transformé le Parti républicain à sa manière, lui imposant des approches inexplorées auparavant.
L’apparition soudaine de Trump en 2015-2016, suivie par le slow takeover du parti par son mouvement Make America Great Again (MAGA), ne sont pas des coïncidences. Ils sont le résultat d’un processus qui s’est déroulé sur des décennies. Déterminer un point de rupture clair dans l’évolution du Parti républicain est difficile. Le Grand Old Party a été créé dans les années 1850 par des politiciens opposés à l’esclavage. Et pourtant, un siècle plus tard, ce même parti d’Abraham Lincoln cherchait le soutien des États du Sud, qui étaient sans voix à cause de la fin des discriminations raciales (Civil Rights Act de 1964). 75,3% de cet article reste à lire. Le reste est réservé aux abonnés.
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