Charles Enderlin, un journaliste franco-israélien résidant à Jérusalem, était le correspondant de France 2 de 1981 à 2015. Il a récemment réédité son livre, Le Grand Aveuglement. Israël face à l’islam radical, publié pour la première fois en 2009. Cette nouvelle édition comprend de nouvelles analyses et témoignages après le 7 octobre (Albin Michel, 416 pages, 24,90 euros). Il met en évidence l’essor de l’islam radical à Gaza sous la surveillance des radars et discute du rôle de la religion dans le conflit israélo-palestinien.
Son livre examine l’expansion de l’islam radical en Palestine, surtout à Gaza. Comment est-ce que ce mouvement a vu le jour ? Charles Enderlin explique que Les Frères musulmans, une organisation militante pour une politique basée sur la charia, ont établi des contacts avec les Palestiniens dès les années 1930. Ils ont soutenu le grand mufti de Jérusalem, qui s’opposait au sionisme.
Saïd Ramadan, le beau-fils du fondateur Égyptien des Frères musulmans, a même fondé la branche palestinienne de la confrérie en 1944. Les relations ont continué à se renforcer suite à la guerre israélo-arabe de 1948.
Le Cheikh Ahmed Yassine a joué un rôle crucial, il était un Palestinien membre des Frères musulmans lorsqu’il était étudiant en Egypte. En 1973, il a créé la Mujama al-islamiya (ou le « centre islamique ») à Gaza. Cette organisation n’avait au départ aucune ambition politique, voulant simplement diffuser l’islam, défendre la moralité et développer des œuvres sociales et des services de santé.
Avec une approche progressive, ses défenseurs ont réussi à gagner du terrain, prendre le contrôle des mosquées, faire passer des discours de la Fraternité, notamment ceux de Sayyid Qutb, un intellectuel égyptien extrémiste à la fois antisémite et anti-occidental. Ensuite, ils ont commencé à brûler des cafés et à attaquer physiquement les personnes qu’ils accusaient de boire de l’alcool ou de mener une vie immorale. Tout cela s’est produit sans l’intervention de l’administration militaire israélienne, qui contrôlait la bande de Gaza à ce moment-là.
Ahmed Yassine, reconnu pour être très intelligent et manipulateur, a convaincu les chefs militaires israéliens de le laisser opérer sans entrave. En 1973, lors de l’ouverture d’un bâtiment de la Fraternité à Gaza, il apparaissait aux côtés du gouverneur militaire israélien, avec qui il a coupé le ruban inaugural. Bien qu’il ait été emprisonné à plusieurs reprises, il a toujours fini par être libéré.
Comment pouvez-vous expliquer ce que vous considérez comme une « grande négligence » qui aurait affecté à la fois l’armée et l’élite politique israélienne ?
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