Dans le contexte démocratique, même les bouleversements de majorité radicaux n’engendrent pas systématiquement une transformation spectaculaire immédiate. Suite à huit années de gouvernance populiste (2015 – 2023) ayant dégradé de manière conséquente l’architecture institutionnelle de la Pologne, la coalition démocrate, au pouvoir depuis décembre 2023, doit naviguer dans un climat antagoniste et répondre aux sollicitations croissantes du public.
Sa première année au pouvoir demeure significative pour les démocrates polonais. Le scrutin du 15 octobre 2023, ayant eu des conséquences politiques majeures, demeure pour eux comme un miracle issu directement du peuple. Ce n’est pas une hyperbole. Rappelons-nous que lors de ce vote sans équivalent (avec 74% de taux de participation et 85% dans certains secteurs), la Coalition civique libérale (KO), l’alliance conservatrice Troisième voie et la Gauche unie ont renversé le parti populiste PiS (le parti Droit et justice) et ses complices, qui sont passés dans l’opposition.
Ce dénouement représentait une surprise colossale étant donné l’inégalité des forces en présence. Après deux mandats ayant ostensiblement mis à mal les principes fondamentaux de la démocratie libérale, le parti de Jaroslaw Kaczynski détenait un certain nombre d’avantages : un financement sans limite, le contrôle de l’Etat hautement politisé et une panoplie de médias – particulièrement publics – recourant à des stratégies de propagande agressives.
Pour les démocrates, il s’agissait d’une relance de dernière minute. Un troisième mandat du PiS aurait signifié une dérive vers les systèmes hongrois et turc, c’est-à-dire la mise en place persistante et presque irrévocable d’un autoritarisme illibéral. L’Union européenne aurait été contrainte de s’y adapter. Ainsi, la date du 15 octobre 2023 marque une étape majeure dans l’histoire politique polonaise, c’est l’événement politique le plus pertinent depuis la fin du communisme.
La présidence a droit de véto.
Un an plus tard, où en sommes-nous ? La coalition dirigée par le Premier ministre Donald Tusk éprouve des difficultés à s’imposer et se trouve dans une position désavantageuse sur tous les fronts. Les désordres hérités de ses prédécesseurs ont créé des dysfonctions et un affaiblissement général des principales institutions du pays, notamment le Tribunal constitutionnel et la Cour suprême. Le président, Andrzej Duda, membre du PiS et fervent défenseur des réalisations de son parti, constitue avec son droit de veto l’obstacle majeur à toute réforme systématique.
La Pologne fait face à un dualisme juridique sans précédent dans les démocraties de l’ouest. Près de 3000 magistrats, soit un quart des juges polonais, ont été nommés contrairement à la Constitution, et le pays est déchiré entre les défenseurs vocaux de l’ancien régime, qui soutiennent un ordre juridique inconstitutionnel, et le gouvernement, qui tente, avec des moyens juridiques limités, de le corriger. « Je défendrai jusqu’au bout les juges que j’ai nommés. Je ne rétracterai ni la moitié ni même une fraction de cela », a déclaré M. Duda à la Cour suprême, le 10 octobre.
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Dans un message publié sur Twitter, le ministre ukrainien des affaires étrangères, M. Kuleba, a appelé la population à boycotter trois entreprises bien connues.