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Les Bororo réinterprètent au musée

Mercredi 9 octobre, au Musée du quai Branly, se déroule une rencontre d’exception dans les réserves ethnographiques souterraines. En blouses blanches et gants bleus, onze experts examinent minutieusement une dizaine d’artefacts collectés par le célèbre anthropologue français Claude Lévi-Strauss et son épouse Dina, il y a près de quatre-vingt-dix ans au Brésil.

Il s’agit principalement d’objets de parure : headbands, boucles d’oreilles, une flûte sacrée, une boîte de plumes, des flèches et bien d’autres. Ces objets, malgré leur âge, conservent une exquise palette de couleurs grâce à une préservation exceptionnelle. Ils font l’objet d’une étude approfondie pour déterminer leur origine, la qualité des matériaux, les techniques de fabrication et les motifs décoratifs.

Parmi ces objets se trouve une parure de cheveux en plumes d’arara (un grand perroquet coloré vivant dans les forêts tropicales américaines) attachée à une structure en bois et un étui à plumes tressé à partir de feuilles de palmier, explique Neiva Aroereaudo, femme bororo de 39 ans, artisan et chef de village.

Toutes ces centaines d’objets ont été récoltés par le couple Lévi-Strauss entre novembre 1935 et mars 1936 de la population autochtone Bororo, originaire de l’État du Mato Grosso, au centre-ouest du Brésil. La population Bororo vit toujours dans cette région, concentrée dans quatre réserves et totalise environ 1 800 personnes. En 1980, leur population était trois fois moins nombreuse, mais atteignait environ 10 000 individus à la fin du XIXe siècle.

Pour la première fois dans l’histoire de cette collection, une délégation composée de cinq Bororo – trois hommes et deux femmes – a été invitée par le musée à observer ces objets anciens créés par leurs ancêtres, près d’un siècle auparavant. Ils étaient accompagnés de cinq ethnologues et étudiants, ainsi que du directeur du département de recherche et d’éducation du musée, Benoît de L’Estoile. Les discussions ont eu lieu soit en portugais soit en bororo.

Actuellement, le groupe étudie une queue de singe ornée de plumes d’ara bleues et rouges. Ismael Atugoreu, le leader culturel bororo et chanteur de cérémonies, pense que cet objet aurait dû être fait avec une queue de jaguar, mais leurs ancêtres n’en ont probablement pas trouvé. Les anthropologues étaient-ils au courant ? Dans ses « carnets nambikawara » conservés à la Bibliothèque nationale, Claude Lévi-Strauss décrit l’objet comme une « queue faite en peau de singe ». Les Bororo ne l’ont donc pas trompé.

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