Est-ce acceptable pour les autorités fiscales de dévoiler à un époux qu’il est dupé, en lui fournissant les noms et adresses des amants, sous prétexte que ces derniers ont rendu à l’épouse des sommes d’argent qui pourraient affecter les impôts du ménage ? C’est le dilemme soulevé par le cas suivant.
En 2008, Mme X, 52 ans et sans emploi, entame une liaison extraconjugale avec M. Y, 70 ans. Ce dernier lui verse mensuellement 600 euros. En 2014, un an avant son décès, il lui donne 80 000 euros provenant de la vente d’un terrain, une promesse qu’il avait faite depuis longtemps. Les enfants de M. Y déposent une plainte pour abus de faiblesse.
Une fouille a lieu chez Mme X où la police saisit des bijoux, de l’argent (383 500 euros dans des sacs en plastique), des pièces d’or et un lingot conservés dans son coffre bancaire. Mis en garde à vue, elle justifie ces possessions comme des cadeaux offerts par cinq hommes fortunés qu’elle connaît depuis un certain temps. Son avocat, désigné par le tribunal, la définit comme une « escort-girl » pour la protéger de l’accusation d’abus de faiblesse. Elle sera disculpée en 2021 sans contestation du procureur ou des héritiers.
Cependant, le procureur, selon ses responsabilités définies par l’article L. 101 du Livre des procédures fiscales (LPF), transmet les preuves indiquant une possible fraude fiscale au directeur départemental des finances.
D’après les documents judiciaires, une contrôleuse a déduit que Mme X avait exercé une profession autonome non enregistrée d’escort-girl entre 2007 et 2015. Elle propose de soumettre les gains de Mme X (736 977 euros) à l’impôt sur le revenu, sous la rubrique des bénéfices non commerciaux (conformément à l’article 92 du code général des impôts), puis à la TVA (selon les articles L66 du LPF). Enfin, elle propose une amende de 80% pour activité secrète (conformément à l’article 1728 du code général des impôts).
Le 30 novembre 2017, elle a envoyé au couple une proposition de correction très précise de 31 pages. Le mari a découvert la fréquence et les lieux des rendez-vous de sa femme, la contrôleuse ayant souhaité déduire les frais de voyages, conformément au barème kilométrique en vigueur. Il a appris des informations issues du dossier pénal.
Jugeant que l’administration a transgressé le secret professionnel obligatoire, il demande 100 000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral. Cependant, il est débouté, les juridictions administratives statuant que le secret professionnel ne s’applique qu’aux tiers. Or, les époux « soumis à une imposition commune sur les revenus obtenus par chacun ne peuvent pas être considérés comme des tiers l’un envers l’autre ».
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