« J’apprécie l’engagement obsédant nécessaire pour développer le vide » : ce paradoxe intrigant et intellectuel tire son origine des pages de Jil Sander par Jil Sander, et s’avère être un aspect central de ses convictions. Parcourir cette merveille d’édition, supervisé par la créatrice d’origine allemande, média discrète mais vénérée par une certaine communauté, offre une compréhension complète de son approche vestimentaire minutieuse et minimaliste.
Avec Sander, aucune extravagance. Point de logos ou de slogans visibles. Seulement un minimum de détails ornés. Le but étant de concentrer tout le focus visuel sur des variations chromatiques usuelles (blanc, noir, marine, rouge cardinal, jaune doré), des designs définis ou adoucis (robes à découpes géométriques, costumes sans doublure) et des matières soigneusement sélectionnées (synthétiques allemands, soies italiennes, cotons indiens, cachemires chinois).
En collaboration avec sa comparse, la journaliste Ingeborg Harms, qui fournit des discours éclairés et accessibles, Jil Sander a revisité ses archives depuis ses débuts en tant que créatrice en 1973, après un court passage dans le journalisme de mode. Une variété de visuels choisis – images de défilés, portraits d’elle à tous les stades de sa vie, photos en coulisses – ont ensuite été remis à la graphiste néerlandaise Irma Boom, qui les a regroupées par catégorie (prêt-à-porter, produits de beauté, architecture de magasins…) et aussi selon un » kaléidoscope » personnel, des « constellations esthétiques ».
Subtilité raffinée. »
Dans plusieurs cas, les photos ont été retouchées et recadrées pour mettre l’accent sur un détail spécifique. Cela est fait dans le but de souligner l’attention particulière que Jil Sander porte aux détails dans ses créations de mode. Un col Mao, des plis façon origami, un élastique finement travaillé sur une jupe taille haute, des détails géométriques sur une robe en cuir noir, des poches soigneusement positionnées sur une veste en daim, ou encore des boutons non attachés situés sous le nombril d’une chemise en lin, sont tous des signes de l’élégance subtile que la créatrice pourra apprécier, que ce soit en portant ou en observant le vêtement. Il y a, comme le souligne Ingeborg Harms, un « contrat silencieux » entre Jil Sander et ses fans, qui ne peut se former qu’à l’essayage.
Dès l’introduction, son obsession de la simplicité est mise en contexte historique. Jil Sander, née en Allemagne en 1943, reconnaît avoir été influencée par son enfance passée à Hambourg. « Avec du recul, je réalise que j’ai été influencée par le renouveau démocratique dont j’ai été témoin », disait-elle. Elle relate un lien entre son approche simple et fonctionnelle de la mode et la renaissance de son pays après la guerre. Le livre cherche à expliquer son travail à travers des comparaisons artistiques, notamment avec les lignes droites de l’architecte autrichien Adolf Loos, l’économie de moyens du sculpteur allemand Ulrich Rückriem et l’obsession de la spirale de l’artiste américain Richard Serra.
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