Marc Hédrich, le président de la cour d’assises en Martinique, peut sembler sérieux à vue d’œil, correspondant à l’image typique d’un justicier rigide et strict avec son allure soignée et ses yeux d’un bleu arctique. Toutefois, ce personnage de 63 ans est plus qu’il n’y paraît. En dehors de son rôle officiel, Hédrich est un rebelle qui n’hésite pas à défier le système. Son outil de prédilection ? Les livres qu’il rédige le soir, où il expose discrètement les lacunes du système judiciaire à travers des histoires historiques.
Son premier livre, « L’Affaire Jules Durand » (Michalon, 2020), raconte l’histoire d’un docker syndicaliste du Havre qui a été condamné à mort par erreur en 1910 pour le meurtre d’un contremaître avant d’être réhabilité en 1918. Hédrich, souhaitant faire sortir cet homme victime d’une « justice de classe » de l’oubli, a engagé dans sa lutte l’ancienne garde des sceaux Christiane Taubira et l’avocat renommé Henri Leclerc, décédé en août. Il mettait également en garde contre le risque d’un système judiciaire devenant un « instrument d’oppression ».
Son œuvre récente, « Les Acquittements scandaleux des Années folles » (Michalon), atteste son désir de continuer à dénoncer les failles du système. Lors de la présentation de son livre à Paris, le 25 septembre, dans un café restaurant de Ménilmontant connu pour ses idées de gauche, Le Lieu-Dit, il décline : « Les juges confondent souvent le devoir de réserve avec l’interdiction de toute expression extérieure ».
La citation finale, « Acquittator, fossoyeur des jurés citoyens », souligne sa position critique envers le système judiciaire.
L’auteur tisse dans son livre les parcours dramatiques de trois meurtriers du début des années 1900 : Raoul Villain qui a fini la vie de Jean Jaurès ; Germaine Berton, qui a tiré sur Marius Plateau, un journaliste de l’Action française, pour venger la perte de Jaurès; et Henriette Caillaux, qui a ôté la vie de Gaston Calmette, le directeur de publication du Figaro, parce qu’elle le tenait pour responsable d’une campagne de presse dénigrante contre son mari, Joseph Caillaux, futur président du Conseil. Chacun d’eux a prévu leur geste et, à l’étonnement général, ils ont tous été acquittés par des jurys populaires.
À cette époque, seuls les jurés de la cour d’assises décidaient de la culpabilité des prévenus. Marc Hédrich décortique ces trois verdicts pour faire comprendre comment, par la suite, la justice a choisi de faire encadrer les jurys par les juges de profession. Il développe l’idée que cette cour, malgré ses erreurs passées, reste de nos jours « le lien entre le peuple français et la justice, l’institution la plus démocratique de notre État de droit ».
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