Un homme âgé de 54 ans a été jugé coupable et condamné à vingt-huit ans d’emprisonnement par la cour d’assises de Seine-Saint-Denis le vendredi 11 octobre, pour avoir assassiné sa femme en la poignardant 16 fois dans la rue près de sa résidence à Epinay-sur-Seine. Sa femme a été protégée par la justice.
Le verdict est tombé après plus de quatre heures de délibération, invoquant l’assassinat de Bouchra Bouali en novembre 2021 par Khalid Fahem, qui venait d’être libéré de prison neuf jours plus tôt après avoir purgé une peine pour violences conjugales. Les intentions meurtrières de l’accusé et la brutalité de son crime, perpétré près de leurs deux enfants, ont été prises en compte par le tribunal.
Fahem, ancien physionomiste de discothèque, avait bénéficié d’une libération anticipée de trois semaines. Cependant, la justice avait omis d’informer la victime de sa libération, bien qu’elle bénéficiait de protocoles de protection.
La victime, âgée de 44 ans et propriétaire d’une boutique de vêtements, vivait dans une peur constante et s’était équipée d’un Taser et d’une bombe lacrymogène pour sa défense. Elle vivait dans l’illusion que son mari était encore en prison. Le décès de Bouali a ému la communauté judiciaire, en particulier les magistrats du parquet de Bobigny qui la protégeaient, reconnaît l’avocate générale Marina Kieny.
L’erreur du parquet de ne pas avoir informé la victime de la libération de son mari a été reconnue. Pour éviter d’autres drames similaires, un décret obligeant l’information des victimes de la libération de leur agresseur a été mis en œuvre en France après ce crime choquant. Cependant, la question reste de savoir si cette mise en garde aurait suffi à prévenir le drame, étant donné la fascination démontrée par l’accusé pour les couteaux et sa résolution de commettre un meurtre.
Sa fille de 17 ans, impitoyable et émue dans son témoignage, a décrit comment Khalid Fahem, dont les seules préoccupations étaient l’argent, son ego et l’obsession de tuer sa mère. Fahem, illettré, avait du mal à accepter l’indépendance de sa femme, qui avait acquis leur maison en 2014 et ensuite une boutique de vêtements en 2018, où il n’était qu’un employé. L’annonce de leur séparation en 2021 a été un bouleversement. Comme l’a conclu son avocate, Agathe Grenouillet : « Il n’a pas commis de meurtre par amour mais parce qu’il sentait sa façade de père et de travailleur s’effriter. » Fahem, ayant menacé de « l’assassiner » avec un couteau, Bouchra avait porté plainte, ce qui a conduit à sa première emprisonnement.
Prudente du comportement de l’accusé, qui avait un casier judiciaire vierge, le bureau du procureur de Bobigny et une organisation spécialisée lui fournissent un téléphone de danger grave pour une prompte alerte à la police. Malgré cela, Bouchra vivait dans une anxiété constante, vérifiant sans cesse sa sécurité. Elle a installé une caméra de surveillance chez elle, changé les verrous, et s’est préparée à se défendre, y compris en achetant un gilet par balles. « J’étais stupéfaite avec mes sœurs. Mais elle a déclaré “c’est un lâche, il pourrait me poignarder par derrière”», a déclaré sa grande sœur, Rahma Bouali, en fondant en larmes à la barre.
En sa cellule, Khalid Fahem méditait. Le seul plan qu’il avait envisagé était d’assassiner son épouse sans avoir d’autre dessein sinon de retourner en détention. C’est ce qu’a révélé un de ses précédents camarades de cellule à Fleury-Mérogis lors d’une visioconférence. Le 17 novembre 2021, il a été libéré. Le soir du 26 novembre, il a patiemment attendu Bouchra Bouali au bas de son immeuble, à l’abri du froid et de la pluie dans une voiture louée. Durant cette période d’attente de deux heures, il a aiguisé le couteau de cuisine qu’il avait récemment acheté dans un supermarché, tout en observant leurs deux filles, âgées de 5 et 14 ans, rentrer de l’école et en mangeant des sucreries. Les coups de couteau qu’il a portés ont été d’une telle brutalité que la lame s’est déformée. Khalid Fahem, dans le box, a éludé, disant qu’il n’avait pas intentionnellement fait cela et que les coups s’étaient produits de cette façon, incapable d’expliquer sa conduite.
En France, un féminicide se produit en moyenne tous les trois jours. D’après le ministère de la Justice, le nombre de féminicides était de 94 en 2023, en baisse par rapport aux 118 enregistrés en 2022.