La semaine de l’annonce des prix Nobel a encore mis en avant l’intelligence artificielle. Au moins la moitié de cette reconnaissance, spécifiquement du côté chimie décernée le mercredi 9 octobre, a été attribuée à AlphaFold, un outil d’intelligence artificielle qui a transformé pour le mieux la vie des biochimistes. Ce logiciel a été développé par le Britannique Demis Hassabis (48 ans) et l’Américain John Jumper (39 ans) au sein de Deepmind, une entreprise cofondée par Hassabis en 2010 puis acquise par Google en 2014. L’autre moitié de l’honneur a été reçue par l’Américain David Baker (62 ans) de l’Université de Washington. Vingt ans plus tôt, sans l’aide de l’intelligence artificielle mais avec tout de même certains succès, il travaillait sur le même sujet.
Ce sujet est un défi pour les humains, bien qu’apparemment une simple tâche pour la nature. Il s’agit de déterminer la forme tridimensionnelle des protéines en se basant uniquement sur l’ordre des vingt acides aminés qui les composent. Une variété de fonctions biologiques dépend des protéines, des virus qui se fixent aux cellules par des protéines comme la fameuse spike du coronavirus, au fer véhiculé dans le sang par les protéines (l’hémoglobine), ainsi que des hormones et des enzymes qui sont également des protéines. Ces protéines ne sont pas simplement une chaîne d’acides aminés, mais sont repliées, torsadées, formant des spirales, des crochets, des poches etc., qui apportent leur fonction spécifique. Même certaines maladies, telles que la maladie de Creutzfeldt-Jakob, sont liées à des erreurs de repliement de ces protéines.
Les chimistes ont souvent pour seule source d’information une séquence de gènes, qui code pour les acides aminés et forme ainsi des protéines. Néanmoins, cette information n’est pas suffisante pour comprendre pleinement leur fonctionnement ou leur mode d’action, une connaissance spatiale est nécessaire. Face à ce défi complexe, l’équipe de Deepmind, menée par John Jumper et composée d’une trentaine de personnes, a réussi à trouver une solution, comme l’indique une étude publiée en juillet 2021. Pour ce faire, ils ont utilisé diverses méthodes d’apprentissage automatique par réseaux de neurones artificiels.
L’outil de Deepmind, AlphaFold, est désormais largement utilisé dans le monde scientifique. À la fin de l’année 2020, AlphaFold a surpassé tous ses concurrents lors d’un concours ciblant la détermination de structures à partir de séquences, doublant les performances atteintes jusqu’à ce jour. Par la suite, Deepmind a expliqué son algorithme, rendu son code accessible et annoncé une collaboration avec le Laboratoire européen de biologie moléculaire (EMBL) pour compléter une base de données, dont les données ont contribué à la conception du logiciel. Le reste de cet article est exclusivement réservé aux abonnés.
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