Une élève, accusée d’avoir agressé une enseignante qui lui demandait de retirer son foulard dans la cour du lycée Sévigné à Tourcoing (Nord), a comparu immédiatement devant le tribunal de Lille le mercredi 9 octobre. L’audience a été reportée au 11 décembre pour donner à l’accusée le temps de préparer sa défense. La jeune adulte – âgée de 18 ans et 4 mois – est accusée de violence ayant entraîné une incapacité totale de travail (ITT) de moins de huit jours et de menace de mort envers un agent public. On lui a interdit d’entrer en contact avec la victime, de se rendre à son domicile ou aux environs du lycée, et elle a été placée sous contrôle judiciaire.
L’élève était en garde à vue depuis le lundi soir précédent. Plus tôt cet après-midi-là, la lycéenne avait remis son voile dans la cour de l’école plutôt que d’attendre d’avoir quitté l’enceinte de l’établissement. La loi du 15 mars 2004 interdit aux élèves de porter des symboles ou des vêtements qui expriment ouvertement une appartenance religieuse, y compris le voile. Une enseignante en sciences et techniques médico-sociales, passant dans la cour, lui avait demandé de le retirer, suscitant la colère de la jeune fille, qui avait réagi par une gifle. L’enseignante avait répliqué par une gifle. S’ensuivirent « plusieurs coups, menaces et bousculades », a rapporté le bureau du procureur de Lille à l’Agence France-Presse.
La lycéenne est apparue menottée dans le tribunal, constituant ainsi une rare exception parmi les accusés habituels. Ses cheveux étaient soigneusement coiffés en chignon, sa voix était assurée et son accent du Nord était notable. Étudiante en baccalauréat professionnel dans les « métiers d’accueil », elle a répondu à la présidente du tribunal en exprimant son désir de rentrer chez elle, en s’excusant pour les coups et en espérant que tout se passerait bien. Elle n’a pas nié avoir giflé son enseignante mais a rejeté l’accusation de l’avoir menacée en disant « Si tu me prends en photo, je vais te cramer », déclaration qui figure au dossier.
Parlant d’une « procédure guidée par l’opinion publique », l’enseignante n’était pas présente à l’audience, mais son avocat, Me Eric Cattelin-Denu, la représentait. Il a défendu sa cliente en faisant valoir qu’elle n’avait fait que respecter les normes de laïcité en vigueur dans les écoles. Quant à la gifle que l’enseignante a donné à l’élève, l’avocat l’a justifiée en déclarant que « La meilleure défense, c’est l’attaque ».
Me Ossama Dahmane, l’avocat de l’étudiante, manifeste son désapprobation face à cette comparution expéditive, qu’il perçoit comme une réaction façonnée par le public. La brutalité infligée a rapidement créé une agitation parmi les politiciens. Le jour suivant, Gérald Darmanin, ancien ministre de l’intérieur et député du district, a questionné la ministre de l’éducation nationale durant la séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale. « Nul n’a pris la défense de l’enseignante, hormis les policiers », a déclaré le représentant législatif. « Elle compte désormais sur le gouvernement pour soutenir l’idéal de laïcité qu’elle enseigne, ce qui est le plus grand placement pour le futur. Il faut un gouvernement solide qui incite ses enseignants à ne pas abandonner leur mission. »
Pour lire la suite de cet article, vous devez être abonné ; il reste encore 36.15% du contenu à parcourir.