Nicolas Jauniaux, le directeur du centre de détention de Majicavo, a démissionné de son poste le lundi 7 octobre, révélant sa décision à travers une vidéo sur Kwezi Télévision. Vêtu d’un uniforme blanc et lisant ses notes, Jauniaux a soumis sa démission dans un état d’émotion intense. Il a expliqué que sa démission visait à attirer l’attention sur le grave problème de surpopulation qui sévit dans son établissement pénitentiaire. Il a rappelé qu’une rébellion impliquant plus d’une centaine de prisonniers avait éclaté le 28 septembre précédant, lors de laquelle les clés des cellules avaient été volées et un gardien avait été retenu en otage pendant plus de trois heures. Jauniaux a souligné dans son message la nécessité urgente d’un deuxième établissement sur l’île. Il a précisé que 650 prisonniers étaient entassés dans l’établissement conçu pour 278 places, certains cellules de 13,4 mètres carrés étant occupés par quatre ou cinq personnes, et que plus de la moitié des prisonniers étaient forcés de dormir sur des matelas à même le sol. À Majicavo, l’une des prisons les plus surchargées de France, la situation s’aggrave.
Le ministre de la justice a annoncé en mars 2022 son intention de construire une nouvelle institution, comme l’a souligné le directeur de l’établissement, qui a depuis démissionné. Le ministre a laissé à l’autorité préfectorale le soin de proposer un site approprié, mais jusqu’à présent, aucune décision finale n’a été prise. Selon une déclaration du ministère de la justice au Monde le 1er octobre, des études préliminaires sur l’urbanisme et le foncier sont en cours depuis 2023 afin d’identifier des terrains disponibles pour le développement d’une prison de quatre cents places et un centre de semi-liberté pouvant accueillir de quinze à vingt personnes.
C’est un acte à la fois singulier et révélateur d’une situation préoccupante. Des démissions dans ces conditions, surtout pour un directeur d’établissement, sont très rares en France, indiquant une crise profonde. Les autorités judiciaires et préfectorales locales et la direction de l’administration pénitentiaire n’étaient pas prêtes à ce départ, ce qui a surpris une partie des employés et de la hiérarchie de l’établissement, qui compte 129 agents au total. En partant, M. Jauniaux explique vouloir soutenir, à son niveau, l’amélioration des conditions de vie pour les détenus et les conditions de travail du personnel. « Je me suis dévoué à cette administration pendant vingt-sept ans et c’est avec tristesse que je la quitte maintenant », conclut-il.
« Alexandre Vissouvanadin, le secrétaire général de la région Réunion-Mayotte pour l’UFAP-UNSA-Justice, observe que c’est un acte fort et singulier. Il est le reflet d’une fatigue professionnelle intense. L’administration lui imposait une mission sans lui fournir les ressources nécessaires. La question est de savoir si son message sera écouté à Paris, où la situation locale est ignorée. La complexité de la question de l’établissement secondaire reste toujours au niveau des promesses électorales », dit le responsable syndical. Il note que les gardiens de prison ont manifesté leur refus de travailler pendant trois jours après la mutinerie. M. Vissouvanadin aussi met en garde contre une possible propagation rapide de cette révolte.