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6 octobre 2024 8 h 43 min

Guerre Ukraine : point du 6 octobre

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Comment la Russie et l’Ukraine emploient-elles des drones ?

Depuis un certain temps, un conflit de drones sans précédent s’est intensifié entre la Russie et l’Ukraine. Un rapport lancé en mai 2023 par un groupe de réflexion britannique spécialisé dans les questions de défense mentionne que les Ukrainiens perdent environ 10 000 drones chaque mois sur le front, soit plus de 300 par jour. Pour mettre cela en perspective, l’armée française détient un peu plus de 3 000 drones dans ses stocks.

Les Ukrainiens et les Russes recourent principalement à des UAV (véhicule aérien sans pilote) de petite taille d’origine civile, abordables et largement disponibles. Ils sont utilisés pour surveiller le champ de bataille et pour guider les troupes ou le tir d’artillerie; certains sont même modifiés pour transporter de petites charges explosives, qui sont larguées sur les tranchées ou les blindés.

Les drones suicides, bien que moins communs, jouent également une part essentielle dans les conflits. Ces véhicules aériens sans équipage, munis de charges explosives, sont déployés sur les fronts de bataille sans objectif prédéterminé. La Russie utilise des drones localement fabriqués, les Lancet-3, aussi bien que les Shahed-136, de fabrication iranienne. L’Ukraine, n’ayant pas sa propre armada navale, utilise des véhicules maritimes sans équipage, des kayaks télécommandés porteurs d’explosifs (notamment du TNT) pour défier ses ennemis.

Le fait qu’autant les Ukrainiens que les Russes se sont investis pour garantir un approvisionnement constant de drones pour leurs soldats, soit par l’achat massif de drones civils sur le marché, soit en développant leurs propres capacités de production, souligne l’importance des drones pour leurs opérations. Au départ faible au debut de la guerre de Donbass qui a éclaté il y a dix ans, l’industrie nationale ukrainienne s’est depuis renforcée. Fin août, le ministre ukrainien de la transformation numérique a annoncé la création d’une réplique du Lancet-3 russe, bientôt mise en service sous le nom de Peroun, le dieu slave de la foudre et du tonnerre.

La Russie, cependant, lutte debido aux sanctions occidentales limitant son accès à des composants électroniques. Selon les agences de renseignement américaines, Moscou aurait néanmoins commencé à construire une usine dans la zone économique spéciale d’Alabouga pour y produire des drones-suicides de technologie iranienne comme le Shahed-136.

En ce qui concerne les réserves de missiles russes, rien n’est certain. Il est extrêmement difficile, voire impossible, de connaître l’état actuel des stocks de missiles de l’armée russe. Bien que les services de renseignement ukrainiens publient fréquemment des informations à ce sujet, leurs estimations sont discutables.

Le porte-parole de la GUR (Direction Générale du Renseignement du Ministère de la Défense), Andri Ioussov, a déclaré, comme le rapporte Liga.net, que l’armée russe avait autour de 2 300 missiles balistiques et de croisière avant le conflit, avec plus de 900 restants en début d’année. À cela s’ajoute, d’après lui, une collection de dizaines de milliers de missiles anti-aériens S-300, d’une portée d’environ 120 kilomètres, ainsi qu’un large stock de S-400, avec une portée triplée par rapport à la version précédente. En août, le vice-président de la GUR, Vadym Skibitsky, suggérait un chiffre de 585 missiles d’une portée supérieure à 500 kilomètres.

Quand on parle de capacités de production, il semblerait qu’elles aient augmenté pour atteindre une centaine de missiles balistiques ou de croisière par mois, selon plusieurs spécialistes. En octobre, la GUR évaluait cette production à 115 unités.

Il semblerait également que la Russie ait fait l’acquisition de missiles de courte portée en Iran et en Corée du Nord et qu’elle continue de se les procurer. L’agence Reuters, en citant plusieurs sources iraniennes, rapporte que 400 missiles de la famille Fateh-110 (portée de 300 à 700 kilomètres) ont été livrés depuis janvier, lorsqu’un accord a été fait. On ne sait pas combien la Russie a obtenu de missiles de la Corée du Nord, mais 24 ont été lancés en Ukraine entre le 30 décembre 2023 et le 7 février 2024, selon le procureur général, Andriy Kostin. À en juger par l’analyse des débris et des trajectoires par des experts, il est probable que ces missiles sont des KN-23 et KN-24 d’une portée d’environ 400 kilomètres.

Et en ce qui concerne les avions de combat F-16 ?

En début août, l’Ukraine a procédé à la réception de premiers F-16, des aéronefs de combat fabriqués en Amérique et plébiscités par Kiev depuis le commencement de la guerre. Pour Oleksandr Syrsky, le commandant des forces armées, le fonctionnement efficace de ces aéronefs contemporains favorisera la protection des soldats ukrainiens. Quant à Ruslan Stefanchuk, président du Parlement, il a exprimé son contentement de l’arrivée du jet de combat tant attendu ayant le potentiel d’améliorer nos compétences de manière significative.

Cependant, le 30 août, le quartier général ukrainien a confirmé le crash d’un des avions et le décès du pilote durant une contre-offensive d’une agression massive de missiles russes sur l’ensemble du territoire ukrainien plusieurs jours auparavant. L’Ukraine faisait depuis le début de l’invasion russe en février 2022, un plaidoyer continuel pour la livraison de F-16 fabriqués en Amérique. Joe Biden, le président américain, en août 2023, a approuvé le déploiement de ces engins fabriqués aux États-Unis en Ukraine, bien que les États-Unis n’en fournissent aucun directement.

D’ici 2028, une promesse de 95 avions a été faite à Kiev par ses alliés : trente viennent de Belgique, vingt-quatre des Pays-Bas, vingt-deux de Norvège, et dix-neuf du Danemark. La Suède s’est également engagée, à la fin du mois de mai, à envoyer un avion de type Awacs, essentiel pour l’acquisition de renseignements et la coordination possible d’opérations avec des F-16.

En outre, il est nécessaire que les pilotes ukrainiens suivent une formation spécifique pour ces avions de combat américains. Onze pays alliés de Kiev se sont engagés à s’occuper de la formation des pilotes.

Quelle aide militaire ses alliés offrent-ils à Kiev ?

Deux années après l’escalade du conflit, le support occidental à Kiev commence à fléchir. Selon le dernier rapport de l’Institut Kiel publié en Février 2024, les aides récemment mises en œuvre stipulent une chute entre Août 2023 et Janvier 2024 par rapport à la période correspondante de l’année dernière. Cette tendance pourrait perdurer, avec les Etats-Unis lutant pour approuver de nouvelles aides et l’Union Européenne (UE) voyant des difficultés à instaurer une aide de 50 milliards le 1er Fevrier 2024, entravée par un opposition hongroise. Ces deux lots d’aide restent cependant à part du dernier bilan rédigé par l’institut Kiel, qui se termine en Janvier 2024.

Les statistiques de l’institut allemand indiquent une diminution et concentration des donateurs autour d’un groupe de pays spécifique : les États-Unis, l’Allemagne, les pays du nord et de l’est de l’Europe, garantissant des aides financières importantes et des armes de pointe. Au total, depuis Février 2022, les nations supportant Kiev se sont engagées à hauteur de 276 milliards d’euros minimum en aides militaires, financières et humanitaires.

En absolu, les pays les plus prospères ont été les plus libéraux. Les États-Unis sont nettement les premiers donateurs, avec plus de 75 milliards d’euros d’aide déclarée, dont 46,3 milliards en aide militaire. Les pays de l’UE ont annoncé simultanément des aides bilatérales (64,86 milliards d’euros) et des aides communes issues des fonds de l’UE (93,25 milliards d’euros), pour un total de 158,1 milliards d’euros.

Quand les contributions sont reliées au produit intérieur brut (PIB) de chaque pays donateur, la position des États-Unis tombe au vingtième rang (0,32 % de leur PIB), étant devancée par des pays adjacents à l’Ukraine et d’anciennes nations soviétiques amies. L’Estonie dirige maintenant le classement des aides en proportion du PIB avec 3,55 %, avec le Danemark (2,41 %) et la Norvège (1,72 %) lui succédant. Les deux places restantes du top 5 sont occupées par la Lituanie (1,54 %) et la Lettonie (1,15 %). Les trois États baltes, qui partagent tous des limites avec la Russie ou son allié la Biélorussie, ont été les donateurs les plus libéraux depuis le début du conflit.
Concernant le classement du PIB, la France apparait en vingt-septième place, avec seulement 0,07 % de son PIB investi, placée juste après la Grèce (0,09 %). L’aide apportée par la France a cessé de croître depuis le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie – elle était placée en vingt-quatrième position en avril 2023, avant d’être placée treizième l’été 2022.
Qu’est-ce que nous savons sur les tensions à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne ?

Les tensions entre la Pologne et l’Ukraine s’intensifient depuis plusieurs mois, principalement à cause du transit de céréales ukrainiennes. Pour faciliter l’exportation et la vente des produits agricoles ukrainiens, notamment vers l’Afrique et le Moyen-Orient, la Commission européenne avait instauré des « voies de solidarité » sans droit de douane, au printemps 2022. Cependant, presque la moitié des céréales ukrainiennes transitent ou terminent leur voyage au sein de l’Union européenne (UE), comme l’indique la Fondation Farm, un groupe de réflexion sur les enjeux agricoles mondiaux. Étant donné que ces céréales ont un prix significativement plus bas que le blé produit dans l’UE, en particulier dans les pays d’Europe centrale, elles ont un impact sur le marché local.

En raison de la menace que cela représente pour le revenu de leurs agriculteurs, plusieurs pays dont la Pologne, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie ont bloqué unilatéralement leurs importations en avril 2023. Cette mesure a été approuvée par Bruxelles, à condition qu’elle n’entrave pas le transit vers d’autres pays et qu’elle soit limitée à quatre mois. Cependant, suite à la fin de l’été, Varsovie a décidé de maintenir sa frontière fermée aux céréales ukrainiennes, estimant que le problème fondamental n’était pas résolu. Cette décision a été prise malgré l’avis de Bruxelles, qui affirmait que l’embargo n’était plus nécessaire car ses analyses indiquaient que les marchés nationaux des céréales n’étaient plus affectés.

Depuis quelque temps, les fermiers polonais ont établi une barrière à la frontière entre la Pologne et l’Ukraine pour bloquer l’entrée des camions ukrainiens sur le sol national. Ils réclament une interdiction totale des produits alimentaires ukrainiens, dénonçant l’augmentation de leurs frais de production alors que leurs entrepôts sont bondés et que les prix atteignent un niveau plancher. En 2024, le chef de l’État ukrainien a interprété le blocage à la frontière comme une preuve de « l’affaiblissement de la solidarité » avec son pays et a demandé des discussions avec la Pologne. «Seule Moscou profite » de ces conflits, a-t-il ajouté, condamnant « l’émergence de slogans ouvertement en faveur de Poutine ».