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Afrique: peu de voitures, nombreux morts

Bien que l’Afrique possède le parc automobile le plus réduit au plan global et l’un des réseaux routiers peu développés, la mortalité sur ses routes est tragiquement élevée par rapport à d’autres régions. Cela s’explique par plusieurs facteurs : infrastructures déficientes, véhicules très anciens, absence de sanctions appropriées et l’indisponibilité de services d’urgence adéquats.

Le rapport 2023 de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) révèle que, bien que l’Asie du Sud-Est et le Pacifique-Ouest (y compris l’Inde et la Chine) aient connu un nombre plus élevé de décès en 2021, l’Afrique les dépasse en termes de mortalité par rapport à la population.

 » L’Afrique détient le triste record de sécurité routière mondiale, avec 19,5 décès pour 100 000 habitants « , mentionne Jean Todt, envoyé spécial du secrétaire général de l’ONU pour la sécurité routière, notant une « tendance croissante ». Par opposition à d’autres régions, le nombre de décès sur les routes africaines a grimpé de 17 % entre 2010 et 2021.

Bien qu’il existe des variations significatives entre les pays, plus de la moitié des pays du continent ont vu une augmentation du nombre de décès, note Haileyesus Adamtei, responsable de la sécurité routière au Programme de politiques de transport en Afrique (SSATP) et expert en matière de transport à la Banque mondiale.

En 2021, approximativement 225 000 personnes ont perdu la vie sur les routes africaines, soit environ 620 chaque jour, selon l’OMS. Et bien que l’Afrique ne représente que 4% du parc automobile global, elle rassemble 19% des accidents mortels sur la route en 2023.

Suivant les propos de M. Haileyesus et d’après l’OMS, les mêmes problèmes de sécurité routière auxquels d’autres régions du monde sont confrontés sont aussi présents en Afrique : conduite en état d’ivresse, excès de vitesse, non-port d’équipements de protection comme le casque ou la ceinture de sécurité, et mépris du code de la route. Ces facteurs contribuent aux graves accidents de la route. La mauvaise qualité des infrastructures routières et les aménagements inadéquats pour les piétons, notamment dans les zones urbaines, sont également pointés du doigt.

En Afrique, un tiers des tués sur la route sont des piétons, contre 21% au niveau mondial. Jean Todt insiste sur la nécessité de routes mieux aménagées, dotées de trottoirs, d’une signalisation adéquate et de passages pour piétons, et cela particulièrement autour des écoles.

Pour M. Haileyesus, les pays africains tendent à privilégier les véhicules motorisés lors de la conception de leurs infrastructures, négligeant souvent le besoin de sécurité des individus. De plus, l’Afrique est la principale importatrice de voitures d’occasion, beaucoup d’entre elles avec plus de quinze ans d’usage et présentant de faibles niveaux de sécurité, signale le Fonds de l’ONU pour la sécurité routière.

Au Sénégal, l’état des véhicules détériorés est un facteur considérable d’insécurité, avec plusieurs accidents causés par des véhicules aux freins défectueux ou aux pneus usés. Selon un porte-parole du ministère des transports routiers à l’AFP, le manque de volonté politique contribue parfois aux problèmes de sécurité routière. Ce dernier reconnaîtra que l’ignorance des règles de la route due à des permis délivrés trop facilement ou par corruption complique la situation et est souvent aggravée par un laxisme des forces de l’ordre, réduisant ainsi la probabilité de sanction en cas d’infractions.

Dans le sillage d’une tragédie impliquant deux bus qui a coûté la vie à quarante-deux personnes en janvier 2023, le gouvernement sénégalais avait établi vingt-deux nouvelles régulations. Cependant, il est à noter que la majorité de celles-ci n’ont pas été effectivement implementées, selon certaines sources. Des mesures, comme l’interdiction de placer des bagages sur les toits des bus, qui pourraient déstabiliser le véhicule, ont été fortement contestées par les professionnels du secteur.

Jean Todt, une autorité en la matière, est d’avis que « les accidents routiers ne sont pas inévitables » et que la sécurisation des routes « devrait être une priorité de premier plan » pour les gouvernements. Selon lui, « au-delà du désastre humain, les accidents de route sont un des principaux freins au développement d’un pays, grugeant en moyenne 4 à 5% du PIB, un chiffre qui peut être encore plus élevé en Afrique ».

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