Dans Cité de verre, le premier livre de sa Trilogie new-yorkaise publié en France en 1987 (Actes Sud), Paul Auster décrit New York comme un lieu infini, un dédale de pas sans fin. Même avec une connaissance approfondie de ses quartiers et ses rues, la ville lui donne toujours le sentiment d’être perdu.
Pour arriver à Brooklyn, nous devons quitter Manhattan et ses édifices « si élevés qu’ils semblent irréels », comme l’écrivain le décrit dans Revenants, le deuxième livre de la trilogie (Actes Sud, 1988). Il faut traverser le pont de Brooklyn à pied, dont les arches en ogives enjambent la circulation en dessous, qui rappelle le « bourdonnement d’un essaim d’abeilles ». Au-delà des ponts, l’immense municipalité début par un secteur paisible de maisons basses. A Brooklyn Heights, quelques maisons en bois subsistent, ainsi que de nombreux brownstones, ces résidences en grès rouge accessibles via un escalier. Dans Orange Street, où une partie de l’action de Revenants se déroule, on découvre la petite église Plymouth et son morceau de jardin avec la statue du révérend Henry Ward Beecher, connu pour ses sermons contre l’esclavage.
Gérard de Cortanze, auteur de « Le New York de Paul Auster » (Le Livre de poche, 2004), se remémore son camarade décédé en avril, avec qui il passait de longues périodes à se promener. Ils flânaient le long de la Promenade de Brooklyn Heights, un lieu qui est également célèbre grâce à son apparition dans le film « Smoke » de Wayne Wang, basé sur un script de Paul Auster (1995). Cette promenade piétonne, où les vélos sont interdits, mesure 600 mètres et offre une vue imprenable sur les gratte-ciel situés de l’autre côté de l’East River. « Paul avait décidé de s’installer à Brooklyn car les loyers y étaient plus abordables qu’à Manhattan », explique Gérard de Cortanze. “Sa femme Siri était terrifiée à l’idée de venir le rejoindre là-bas”. Après un certain temps à Carroll Gardens, un quartier qui était autrefois dominé par les Italiens et la mafia, l’écrivain américain finit par se fixer définitivement à Park Slope. Aujourd’hui, c’est un coin aisé qui est à côté de Prospect Park, une grande zone verte conçue par Frederick Law Olmsted et Calvert Vaux, les créateurs de Central Park.
Gérard de Cortanze poursuit en disant: « Je l’avais croisé par hasard sur Park Slope’s 7th Avenue et j’ai décidé de le suivre pour découvrir son adresse afin de pouvoir lui écrire. Céline Curiol, qui est devenue écrivaine grâce à l’encouragement de Paul Auster, ajoute, « Il était très attaché à Brooklyn et à sa diversité humaine ». Son film « Brooklyn Boogie », réalisé juste après « Smoke » et qu’il a coréalisé, est l’histoire de cette diversité multiculturelle du borough avec ses « 90 ethnies et ses 1500 églises, synagogues et mosquées », comme le fait remarquer un personnage.
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