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Panique après tirs à Conakry

Jeudi 26 septembre, en début d’après-midi, la presqu’île de Kaloum, habituellement animée, s’est soudainement retrouvée dépeuplée. Cela est dû à une frénésie causée par des tirs entendus par les habitants de ce quartier central de Conakry, où se situent notamment le palais présidentiel et divers ministères. Cette pagaille a été aggravée par l’intervention des forces spéciales, qui étaient lourdement armées et qui ont obligé les travailleurs et les passants à évacuer la zone. En conséquence, d’importants embouteillages se sont produits sur les voies permettant de quitter Kaloum pour se rendre au nord de Conakry jusqu’en début de soirée.

En Guinée, où le coup d’Etat du général Mamadi Doumbouya a porté au pouvoir la junte en 2021, cet incident a suscité rapidement de nombreuses questions. Pour tenter de mettre fin à ces rumeurs de déstabilisation, la présidence a publié une déclaration le soir même. Selon la déclaration, des « tirs présumés… des rumeurs infondées créées de toutes pièces… ont généré une atmosphère de panique dans certaines zones », toutefois, la nature exacte de l’incident n’a pas été précisée.

Plusieurs explications de ces tirs ont circulé tout au long de la soirée. Certaines personnes suggèrent qu’une grenade aurait été accidentellement déclenchée à l’entrée du palais présidentiel par un membre de la garde républicaine, déclenchant une alerte rouge. « Les quatre garnisons de Kaloum n’ont eu que dix minutes pour se préparer au combat. Les résidents ont vu cela et ont eu peur », explique une source proche du président.

Ambiance tendue.

La situation tendue entre deux associés proches de Mamadi Doumbouya au sein des forces spéciales a été mentionnée par d’autres sources : le colonel Mouctar Kaba, connu sous le nom de « Spartacus », et son bras droit, le lieutenant-colonel Baba Barry. Ces trois personnages avaient été les protagonistes du coup d’État du 5 septembre 2021 contre le président Alpha Condé, qui avait perdu en popularité après avoir essayé de maintenir sa position avec un troisième mandat.

Différentes sources indiquent que la relation entre Mouctar Kaba et Baba Barry s’est envenimée ces derniers mois. En juillet, Spartacus a réintégré ses fonctions après deux années de formation en France, pendant lesquelles il avait été remplacé par son adjoint. Depuis, il y aurait une atmosphère conflictuelle entre ces deux militaires.

En outre, certains disent qu’il y a eu une agitation en raison de l’annonce du décès du colonel Célestin Bilivogui, qui avait disparu un an auparavant suite à son retrait de l’armée, quelques jours après l’évasion de l’ancien dictateur Moussa Dadis Camara (2008-2010), de son ex-ministre Claude Pivi et d’autres officiers jugés pour le massacre du 28 septembre 2009, de la prison de Conakry. Son décès a été confirmé mercredi à sa femme qui a identifié son corps à la morgue de l’hôpital Ignace-Deen de Conakry.

Cette récente mort mystérieuse d’un militaire s’ajoute à celle du général Sadiba Koulibaly, ancien chef d’état-major des forces armées de 2021 à 2023. Jugé coupable de « désertion et de détention illégale d’armes » par le tribunal militaire de Conakry le 15 juin, il est décédé en prison une semaine plus tard.

Tensions internes.

Suite au décès du général Koulibaly, Moussa Dadis Camara et Claude Pivi ont subi de lourdes peines lors du procès lié au massacre. De plus, Célestin Bilivogui a été trouvé mort récemment. Tous ces hommes étaient des Forestiers [originaires du sud-est de la Guinée] et commandaient beaucoup de respect au sein de leur communauté. Il est suggéré par un ex-officier guinéen que leur sort malheureux pourrait être le résultat de la manifestation de la colère par des membres mécontents de leur communauté.

Le gouvernement de Mamadi Doumbouya est confronté à des tensions internes depuis plusieurs mois, spécifiquement au sein de l’armée. En janvier, le bureau présidentiel avait déclaré avoir déjoué une tentative de coup d’État. Les instigateurs présumés, présentés dans une vidéo de la présidence, avaient avoué leur crime avant de recevoir la grâce présidentielle sans jugement. Le capitaine Abdoulaye 2 Cissé, un membre du Bataillon autonome des troupes aéroportées et de l’ancienne garde présidentielle sous Lansana Conté (1984-2008), était inclus parmi eux.

Le général Doumbouya, un ex-légionnaire français qui dirige la junte depuis trois ans, entretient l’incertitude sur sa possible candidature à la présidentielle dont la date est différée depuis plusieurs mois. Bien qu’il ait promis de ne pas se présenter lorsqu’il a promulgué la charte de transition qui doit se conclure le 31 décembre, la possible perspective de sa candidature a suscité des réactions négatives de l’opposition dans un climat de répression croissante des opinions divergentes. Le 9 juillet, Mamadou Billo Bah et Oumar Sylla, deux leaders du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC), un groupe de la société civile qui critique la junte, ont été kidnappés et sont toujours portés disparus.

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