« Fini les vidéos de dégustation d’alcool », ont annoncé Mcfly et Carlito, deux youtubeurs célèbres, à leurs sept millions d’abonnés, le jeudi 26 septembre. Ces vidéos, qui ont attiré des millions de vues, ne seront plus produites après un rappel légal de l’association Addictions France. Carlito a reconnu que cette intervention était justifiée, surtout vis-à-vis des jeunes spectateurs. Leur message ne peut plus encourager à boire de manière ludique avec ses amis.
Le jour même, un rapport d’Addictions France a décrit les réseaux sociaux comme le « nouveau Far West » pour la promotion de l’alcool. Le rapport a souligné une présence omniprésente, interactive et constante du marketing alcoolisé, porté par des influenceurs, des contenus publicitaires engageants associant l’alcool à des sentiments positifs et des algorithmes ciblés. L’association, qui s’engage dans des initiatives de sensibilisation et de prévention de toutes formes d’addictions, a révélé que, entre juin 2021 et janvier 2024, 11 300 contenus promouvant l’alcool ont été identifiés sur Instagram et TikTok, émanant de 802 marques d’alcool et 483 influenceurs.
Des marques comme Ricard, Heineken, Aperol ou Bombay Sapphire figurent parmi les plus représentes. Ceci est souvent le résultat de collaborations avec des créateurs de contenu acceptant des partenariats commerciales pour faire la promo de leurs produits. Des personnalités popularies comme Léna Situations, sont fréquemment sollicitées pour ce type de collaborations. Une enquête de l’École des Hautes Études en Santé Publique a indiqué que 79% des jeunes âgés de 15 à 21 ans voient régulièrement des publicités pour des boissons alcoolisées sur les réseaux sociaux.
Addictions France qualifie la loi Evin, qui régule la publicité d’alcool, comme insuffisante. En effet, bien que cette loi, mise en œuvre en 1991, limitait la publicité pour l’alcool à des supports définis, en excluant notamment la télévision et le cinéma, l’association déplore sa constante affaiblissement suite aux sollicitations actives des producteurs d’alcool. Ils déplorent notamment son manque d’adaptation au milieu numérique.
Une modification de la loi en 2009 autorise la publicité pour l’alcool en ligne, à quelques exceptions près comme les sites jeunesse. Elle impose cependant des conditions, la publicité ne peut être ni intrusive ni interstitielle, apparaissant directement lors de la consultation d’une page web, ou entre deux vidéos par exemple.
Addictions France dénonce le manque d’efficacité de la loi de juin 2023 régulant les influenceurs, qui n’interdit pas la publicité pour l’alcool. Cette loi leur rappelle simplement la nécessité de respecter la loi Evin. Myriam Savy, responsable du plaidoyer pour Addictions France, a insisté sur le besoin de retourner aux principes de base de la loi Evin et d’interdire toute publicité pour l’alcool sur les réseaux sociaux.
La « loi sur les influenceurs » a instauré un groupe de quinze représentants chargés de contrôler les publications (sur tous les sujets) de 150 000 créateurs de contenu. Cependant, l’association déclare que ces mesures sont « manifestement insuffisantes ». Malgré que 85% des procédures judiciaires initiées par cette unité se soient terminées par des succès, ces actions demeurent prolongées et compliquées. De plus, l’association déplore que les sanctions imposées ne soient « pas dissuasives ». La pénalité maximale encourue pour violation de la loi Evin est de 75 000 euros, un montant jugé « insignifiant » par l’association pour des entreprises industrielles qui investissent des dizaines de millions d’euros dans leurs campagnes publicitaires.
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