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26 septembre 2024 18 h 45 min

Procès policier après éborgnement Rodrigues

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Selon une information de l’Agence France-Presse confirmée par Mediapart, le parquet de Paris a récemment sollicité le renvoi devant le tribunal d’un officier de police soupçonné d’avoir mutilé un « gilet jaune », Jérôme Rodrigues, lors d’un rassemblement place de la Bastille à Paris en début d’année 2019. Diverses sources proches de l’affaire rapportent que cette demande, formulée le 20 septembre, vise Brice C., accusé d’avoir perpétué des actes de violence avec une arme en tant que membre des forces de l’ordre, causant une mutilation ou une invalidité permanente. Un tel crime pourrait entraîner une peine de quinze ans de prison.

Brice C. et un autre officier de police, Baptiste R., ont été mis en examen en janvier 2021, le premier pour la mutilation de Jérôme Rodrigues par une grenade de désencerclement, et le second pour avoir blessé à la jambe un de ses amis, Michaël, par un tir de lanceur de balle de défense lors d’une manifestation de « gilets jaunes » le 26 janvier 2019. Pour Baptiste R., le parquet a requis un procès pour violences volontaires aggravées n’ayant pas entraîné une incapacité totale de travail de plus de huit jours, ce qui constitue un délit.

Au moment des événements, l’origine des blessures avait été sujette à confusion en raison de l’usage simultané du lanceur de balle de défense et de la grenade de désencerclement par les forces de l’ordre. Les autorités avaient même nié l’usage du lanceur de balle de défense à ce moment-là. Cependant, l’inspection générale de la police nationale (IGPN) et le magistrat instructeur, grâce à l’analyse de nombreuses vidéos amateur et de vidéos de surveillance de la scène, ainsi qu’à une reconstitution des faits à la place de la Bastille, ont permis d’établir clairement les responsabilités.

Interrogé jeudi par l’AFP, M. Rodrigues a déclaré se sentir « triste » et a affirmé que ce sujet était pour lui « clos, appartient au passé ». Son défenseur, Arié Alimi, a annoncé que la période de « régler les comptes » est arrivée : « Ils vont devoir rendre des comptes à Laurent Nuñez, aux syndicats de police, à la Place Beauvau et à Emmanuel Macron, responsables des victimes de la répression policiaire ».
Le leader des mouvements « gilets jaunes » a « été l’objet d’une persécution policière incessante pour avoir défié une politique de précarité excessive du peuple français », s’est insurgé Me Alimi. « Le défenseur de l’ordre public soutient sans relâche depuis le début de cette procédure qu’il a agi en état de légitime défense », a déploré de son côté Sébastien Journé, qui représente Brice C. en collaboration avec Gilles-William Goldnadel.
Le jet de grenade a été déclenché en réaction à « des violences perpétrées par des black blocs se trouvant à proximité immédiate de M. Rodrigues », a ajouté l’avocat, qui promet de soumettre de « nouvelles remarques très intenses » au juge instructeur.
« Contexte particulièrement tendu »
Ce 26 janvier 2019, les deux agents de police, membres des compagnies d’intervention (CSI), étaient en intervention dans « une ambiance tendue » avec des « circonstances particulièrement difficiles » et un « besoin exprimé d’une formation spécifique à la gestion des conflits », souligne le procureur dans ses déclarations, que l’AFP a pu consulter. Ils ne pouvaient avoir recours à la violence spontanée et sans préavis que si des violences étaient commises ou s’ils ne pouvaient autrement garder le contrôle du lieu occupé, rappelle le magistrat.

Suite aux investigations, il a été conclu que Jérôme Rodrigues et Michaël n’ont montré aucune agressivité ni menace envers les forces de l’ordre, mis à part quelques insultes, selon la procureure. Elle a écarté l’idée que l’un des leaders du mouvement des « gilets jaunes » ait pu être visé personnellement.

La procureure a souligné que les « remarques acerbes » d’un autre manifestant ont conduit au lancement de la grenade par Brice C. Ces remarques, « inappropriées », ne constituaient en aucun cas « une menace physique ». Il appartient maintenant au juge d’instruction de décider si un procès aura lieu ou non.