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21 septembre 2024 3 h 49 min

Michel Barnier : deux visages

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Qui est désormais à la tête de la planification écologique à Matignon? Est-ce Michel Barnier, l’ex-ministre en charge de l’environnement qui a promulgué une loi significative au milieu des années 1990? Est-ce Michel Barnier, qui s’est présenté à la primaire de droite et a décrié l’énergie éolienne en 2021? Ou bien s’agit-il d’un autre Michel Barnier, le nouveau Premier ministre, contraint de gérer une situation financière publique extrêmement préoccupante, soutenu par une minorité déjà agitée et sous l’œil vigilant d’une extrême droite sceptique en matière de climat?

Dans leur quête de réassurance, les défenseurs de l’environnement ont d’abord cherché du réconfort dans le passé du Premier ministre et dans sa mention de « la dette écologique » lors de la transition du pouvoir à Matignon, le jeudi 5 septembre.

Cependant, son manque de communication sur ce défi et le désordre politique actuel ne font qu’exacerber leurs incertitudes. Morgane Créach, Directrice générale du Réseau Action Climat, illustre bien ces doutes: « Nous allons juger sur les faits, car nous avons déjà vu de nombreux politiciens utiliser des discours puissants mais ne rien faire par la suite. Oui, il a été ministre de l’environnement, mais depuis plusieurs années, il est sceptique envers la transition. Nous attendons de voir s’il rétablit les réductions budgétaires, car son budget devra être considéré comme un acte politique. »

Michel Barnier a longtemps été une figure singulière parmi les conservateurs. Alors que ses camarades se disputaient des rôles au sein du gouvernement interne, de la défense ou de Bercy, Barnier a été attiré par le domaine de l’environnement. Comme l’observe Antoine Vermorel-Marques, député (Les Républicains, LR) de la Loire, qui a fait la connaissance de Barnier en 2013 quand ce dernier l’a engagé, alors étudiant à Sciences Po, pour organiser ses archives, cette décision reflète bien la personnalité de Barnier. D’après ceux qui le connaissent bien, cet intérêt pour l’écologie remonte à l’époque où il passait son enfance aux pieds des massifs alpins, dans l’Isère. Ayant travaillé auprès de Robert Poujade, le premier ministre de l’environnement en France, entre 1971 et 1974, à l’âge de 22 ans, cette caractéristique a sans aucun doute influencé le début de sa longue carrière politique. Il est également reconnu pour sa « tendance à ne pas déranger ».

Suite à la rédaction d’un rapport parlementaire en tant que représentant de la Savoie, un livre intitulé Chacun pour tous. Le défi écologique (Stock, 1990) a été réalisé. Les nombreux points mentionnés dans ce livre ne seraient pas démentis de nos jours par les activistes de l’écologie politique. Il y fait allusion aux « limites imposées par la Terre en termes de notre survie », y exprime son désarroi face à la diminution de la biodiversité, qu’il décrit comme « le préjudice biologique le plus critique de notre ère étant donné son caractère entièrement irréversible » et critique les « actions principalement influencées par les bénéfices économiques ». « L’excès d’énergie provenant d’un parc nucléaire largement surdimensionné et la baisse relative du coût des matières premières ont conduit à une promotion effrénée du » tout électrique «  », écrit-il. Michel Barnier, se cachant en tant que décroissant au sein de la droite gaulliste ? « La croissance peut être en accord avec l’environnement », ajoute-t-il en recommandant des mesures strictes de préservation de la nature. 69,31% de cet article restent à lire. Le reste est réservé aux abonnés.