Aujourd’hui, il y a sept chrétiens vivants à Deir ez-Zor, une ville située à la frontière de la Badiya, le désert de Syrie, près de l’Irak. Ce groupe est composé d’un frère et d’une sœur dans leur septième décennie de vie, ainsi que d’une autre fratrie de cinq qui sont également d’un âge avancé. Aucune des trois cents familles chrétiennes qui ont quitté la ville en 2013, lors de l’occupation par les djihadistes du Front Al-Nosra et ensuite par l’État islamique (EI), n’a fait le choix de revenir.
Les écrits, intitulés « carnets de Syrie », sont une collection de reportages faits en été 2024. Pour des raisons de sécurité, plusieurs des individus mentionnés ont choisi de rester anonymes et c’est pourquoi les auteurs des reportages ne sont pas indiqués non plus.
« Même si les maisons et les églises étaient remises en état, les chrétiens ne reviendraient pas. L’année des aînés est passée et les plus jeunes ont déjà refait leur vie ailleurs. Beaucoup ont vendu leurs propriétés. D’autres ont choisi de les garder. Ils sont revenus une fois pour voir comment elles se tenaient après la libération de la ville le 15 septembre 2017. Depuis lors, ils sont en pleine réflexion « , dit Michel (un nom change pour l’anonymat), l’un des sept chrétiens restants à Deir ez-Zor.
Les dirigeants des différentes églises chrétiennes d’Orient ont examiné l’ampleur des dégâts, mais aucun n’est revenu. Seul un prêtre capucin basé au Liban fait des visites régulières pour surveiller l’avancement d’un projet qu’il chérit : la reconstruction d’une église Art déco des années 1930, qui est un monument historique, ainsi que le monastère adjacent qui ont été anéantis par les djihadistes de l’EI. Il ambitionne aussi de récupérer l’école voisine, qui était dirigée par les soeurs de Mère Teresa avant d’être nationalisée par l’Etat dans les années 1980.
Sans prêtre ni église, il est inconcevable de persuader toute personne de la communauté chrétienne à retourner à Deir ez-Zor. Les djihadistes ont tout fait pour s’assurer de leur départ. Tous les lieux de culte ont été pillés et dévastés, y compris le mémorial arménien, abritant les restes des victimes du génocide de 1915 commis par les Jeunes Turcs. « Les Turcs ont demandé à Nosra d’effacer tout souvenir du génocide », suggère Michel.
Barrages d’artillerie
Ceux qui ont choisi l’Europe comme leur nouvelle demeure ne reviendront probablement jamais dans cette ville de 330 000 habitants, érigée au beau milieu du désert. Cinquante familles chrétiennes, établies à Hassaké, dans le nord-est du pays sous administration kurde, demeurent indécises. « Il y a encore un espoir. Ces familles n’ont pas vendu leurs propriétés. Mais pourquoi reviendraient-elles maintenant? Là-bas, elles bénéficient de l’aide des associations chrétiennes. À Deir ez-Zor, l’aide est presque inexistante », questionne le résident chrétien.
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