Longtemps considérés comme égarés ou relégués au fond des tiroirs, les masques chirurgicaux font de nouveau partie de la réalité quotidienne au Brésil, à la suite de leur utilisation massive durant la pandémie de Covid-19. Dans ce cas, leur réapparition n’est pas due à une nouvelle vague virale, mais à la nécessité de se protéger des ravages causés par les incendies de forêts sévissant à travers le pays.
En effet, la pollution causée par ces incendies a engendré un couvert de fumée qui s’étend sur plus de 60 % du pays, soit environ 5 millions de kilomètres carrés. Cette couche de fumée grise et épaisse, visible depuis l’espace, est également fortement ressentie par les populations locales.
Par exemple, à Porto Velho, en Amazonie, la concentration de particules PM2,5 dans l’air a récemment atteint 339 microgrammes par mètre cube. C’est 68 fois supérieur à la limite annuelle recommandée par l’Organisation mondiale de la santé. Par ailleurs, depuis le 9 septembre, la métropole de Sao Paulo détient le triste record de la ville la plus polluée au monde, titre attribué par la société suisse IQAir, qui analyse la qualité de l’air dans plus d’une centaine de grandes villes du monde.
Aucun secteur, aucune banlieue ne sont épargnés par ces conditions malsaines. Eliane Silva, résidente de l’immense favela de Paraisopolis à Sao Paulo, affirme avoir développé une sécheresse et une irritation intense de la gorge qui l’ont obligée à consulter un médecin. Cela s’est passé le jeudi 12 septembre. Cette femme de ménage, de 35 ans et de race noire, souffre d’une inflammation de la thyroïde. Elle n’est pas la seule à éprouver ces difficultés respiratoires. En fait, sa sœur de 37 ans est atteinte de sinusite chronique et sa fille de 7 ans souffre de rhinite. « On tente de boire beaucoup d’eau et de rester à l’intérieur, mais c’est effrayant et compliqué » reconnait Eliane Silva.
« Dans l’impression qu’on vit à Tchernobyl ! »
En déplaçant de dix kilomètres au nord, au parc Augusta situé en plein centre-ville, les toux et expectorations sont aussi courantes que les gazouillements d’oiseaux. Giovana Carolina, une jeune fille de 20 ans vêtue d’un bikini coloré, décrie la situation et compare l’atmosphère à celle de Tchernobyl, malgré le fait qu’elle soit venue bronzer sous la fumée. À quelques mètres d’elle, deux amis perchés sur un banc, Caetano Nogueira Marques et Melissa Izabel, 21 et 19 ans respectivement, ont l’air inquiet. « Je saigne du nez quotidiennement depuis une semaine, » partage le jeune homme. Quant à Melissa, elle confie avoir réduit sa consommation de cigarettes : « Je subis des baisses de tension et je deviens incapable de marcher et de parler simultanément ».
Le Brésil est actuellement aux prises avec la sécheresse la plus grave de son histoire, accentuée par le changement climatique qui entraîne des pics de températures inédits en hiver austral, et le phénomène El Niño. D’après les enregistrements, l’humidité dans 244 municipalités est équivalente ou même moindre à celle du Sahara. Cette situation a déclenché d’immenses feux, dont beaucoup sont intentionnels. Plus de 176 000 incendies ont été recensés depuis le début de l’année par l’Institut national de recherches spatiales. Les détails restants de cet article sont accessibles uniquement aux abonnés.