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13 septembre 2024 1 h 47 min

Sénégal : président dissout Assemblée nationale

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La fin de l’incertitude apparente s’est produite ce jeudi 12 septembre à 20 heures. Le dirigeant du Sénégal, Bassirou Diomaye Faye, a proclamé sur la télévision nationale la dissolution de l’Assemblée nationale et a appelé à des élections législatives avancées le 17 novembre. « Je liquide l’Assemblée nationale pour solliciter auprès du peuple souverain les outils institutionnels qui vont me donner la capacité de réaliser la transformation systémique que je leur avais garantie », a-t-il proclamé lors d’un discours succinct.

La proclamation de cette dissolution était anticipée. Fin août, le Conseil constitutionnel avait souligné que la dissolution de l’Assemblée nationale pourrait être légalement déclarée par le président à partir du 12 septembre, soit deux années après le début de la quatorzième législature, le 12 septembre 2022.

L’absence de majorité à l’Assemblée, toujours contrôlée par des députés loyaux à l’ancien président Macky Sall, signifiait que Bassirou Diomaye Faye, élu le 24 mars avec 54% des voix, ne possédait pas tous les outils institutionnels nécessaires pour mettre en œuvre son programme révolutionnaire. Son parti, le Pastef (les Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) n’avait que 23 députés sur 165 – et une quarantaine en incluant ses alliés de la coalition Yewwi Askan Wi.

« La culture de l’obstruction »

Dans les semaines récentes, un désaccord entre le gouvernement et les forces d’opposition a paralysé l’activité gouvernementale. Les représentants de la coalition Benno Bokk Yakaar (BBY), qui appuient Macky Sall, ont boycotté le débat sur l’orientation budgétaire fin juin, entraînant son annulation. La semaine passée, l’initiative de dissoudre le Haut Conseil des collectivités territoriales (HCCT) et le Conseil économique, social et environnemental (Cese), critiqués par le gouvernement pour leur coût élevé, a été unanimement rejetée par les députés de l’opposition. « L’espoir d’une collaboration sincère avec la majorité parlementaire n’était qu’une illusion, celle-ci ayant choisi de favoriser l’impasse », a déclaré le président dans son discours.

De son côté, Ousmane Sonko, premier ministre et leader du Pastef, a été l’objet de plusieurs motions de censure, dont une introduite par le parti de l’ancien régime. Son discours de politique générale (DPG) qu’il devait prononcer ce vendredi 13 septembre à l’Assemblée nationale, a été révoqué suite à la dissolution. Un calendrier qui suscite des questions au sein de l’opposition.

Selon le texte original, les députés maintiennent leur poste jusqu’aux prochaines élections. Cependant, ils ne peuvent plus se rassembler, que ce soit en session normale ou spéciale. La dissolution annoncée le 12 septembre, juste avant la DPG d’Ousmane Sonko, est vue par Alassane Ndao, un enseignant-chercheur à l’université Gaston-Berger de Saint-Louis, comme une tactique pour sauver le premier ministre et éviter une motion de censure. Une dissident du Pastef affirme que cette dissolution est positive, car ils ont presque 80 lois déjà rédigées en attente pour être votées par une nouvelle Assemblée. Mais pour cela, le président et son parti doivent remporter les élections législatives pour obtenir la majorité qualifiée qu’ils désirent.

Alassane Ndao continue en affirmant que c’est crucial pour le Pastef de gagner la majorité. Sinon, leur mandat pourrait devenir difficile car une grande partie de leurs promesses reposent sur des réformes constitutionnelles nécessitant l’approbation des trois cinquièmes de l’Assemblée, c’est-à-dire 99 députés.

Ibrahima Diallo, responsable de la communication au Pastef, se montre optimiste, déclarant qu’ils sont prêts pour la « course contre la montre ». De nombreuses sources interrogées par Le Monde suggèrent que le premier ministre (et président du parti), Ousmane Sonko, sera probablement nommé en tant que tête de liste au niveau national, avec une forte implication dans la campagne. Avant cela, il s’est rendu à Matam, la place forte de Macky Sall dans le nord du pays, où il a promis de transformer la région en futur centre économique.

La victoire décisive du Pastef au premier tour de l’élection présidentielle en mars n’évitait pas la nécessité de constituer des listes de coalition. Selon Moussa Diaw, un professeur émérite en sciences politiques, la complexité du système électoral sénégalais, qui combine des composantes proportionnelles et majoritaires, oblige les partis à s’unir pour parvenir à une majorité tangible.

L’opposition, quant à elle, semble en position de faiblesse depuis les dernières élections présidentielles. Le 3 septembre, l’ancien président Macky Sall a déclaré que la coalition BBY, qui l’a porté au pouvoir en 2012 et soutenu tout au long de ses mandats, serait dissoute. Entretemps, Amadou Ba, son ancien Premier ministre et ex-candidat à la présidence, a formé son propre parti quelques jours auparavant. « Ils ne sont pas bien équipés et sont toujours à la recherche d’un leader alors que les élections se profilent », remarque Diaw.

Adji Mergane Kanouté, la vice-présidente du groupe parlementaire BBY maintenant dissous, estime que la coalition BBY devra être remodelée et étendue à d’autres partis politiques et groupes citoyens. Elle affirme que le nouveau parti d’Amadou Ba ne sera pas exclu. « Nous sommes toujours en pourparlers. Nous devons tout mettre en œuvre pour obtenir une majorité, gagner, ou à défaut établir une cohabitation », ajoute-elle en conclusion.