Au cours des élections législatives du mardi 10 septembre, le Front d’action islamique (FAI), qui est l’aile politique des Frères musulmans en Jordanie, a opéré une percée significative dans l’histoire électorale du royaume hachémite. Selon les chiffres officiels rendus publics mercredi soir, sur les 38 candidats présentés par le parti d’opposition, 31 ont réussi à obtenir un siège au Parlement. Ce résultat était inattendu et a pris par surprise les observateurs qui anticipaient un score inférieur. Même si le FAI est désormais le parti majoritaire au sein du Parlement, ses députés restent minoritaires dans un hémicycle de 138 membres, dominé par des partisans fidèles à la monarchie.
Ces élections se sont tenues durant une période de conflit à Gaza. Depuis octobre 2023, le rythme de vie des Jordaniens, qu’ils soient d’origine palestinienne ou non, est affecté par ce conflit. Ils dénoncent la violence des représailles de l’armée israélienne suite à l’attaque meurtrière menée par le Hamas le 7 octobre 2023. En réaction, de nombreux Jordaniens ont choisi de boycotter les marques américaines accusées de soutenir Israël et de faire des dons pour l’aide humanitaire envoyée à Gaza par le royaume.
Les islamistes et la gauche ont été des acteurs clés dans l’orchestration des manifestations pro-palestiniennes à Amman. Ces manifestations hebdomadaires appellent souvent à l’annulation de l’accord de paix signé avec Israël par Amman en 1994. Le FAI a su capitaliser sur cette frustration, ainsi que sur l’élan de sympathie à l’égard du Hamas, qui émane également de la Fraternité musulmane et qui est perçu de manière positive par la majorité des Jordaniens qui le considèrent comme une force de résistance. « Gaza, la Palestine et Jérusalem sont tous des points clés de la boussole officielle et populaire en Jordanie », a déclaré Wael Al-Saqqa, secrétaire général du FAI, accueillant avec satisfaction les résultats du vote. Il a exhorté les Jordaniens à continuer de soutenir les Palestiniens « vers la libération ».
Cependant, des candidats du FAI ont été soumis à des pressions de la part des services de sécurité au cours des mois précédant l’élection. Il semble que le mouvement ait décidé de ne pas s’opposer au pouvoir hachémite, même si sa performance électorale semble être une remise en question de la politique d’Amman à l’égard de Gaza.
La Jordanie, un allié de la France et des États-Unis, appelle à mettre un terme à l’offensive israélienne en territoire palestinien tout en continuant à collaborer sur le plan sécuritaire avec Israël. Le trône jordanien s’oppose au Hamas, son aile politique ayant été exclue du royaume en 1999, et soutient indirectement son affaiblissement à Gaza, bien que cela ne soit pas exprimé ouvertement. Cependant, la Jordanie craint qu’une déstabilisation causée par les déplacements forcés de Palestiniens ne survienne. Les craintes sont devenues plus vives suite à la récente vague de raids israéliens dans la Cisjordanie occupée. Ayman Safadi, le ministre des Affaires étrangères jordanien, a reproché à Israël, début septembre, de « lancer une autre guerre » dans cette région frontalière du royaume hachémite.
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