Dans l’Empire du Soleil Levant, chaque institution scolaire possède son propre blason, drapeau et hymne louant la beauté des saisons ou promouvant les valeurs éducatives. Parfois, ces textes provoquent des réponses inappropriées. C’est le cas de l’hymne du lycée international de Kyoto, situé à 450 kilomètres de Tokyo. Pour certains nationalistes locaux, les paroles de l’hymne sont inacceptables car elles sont en coréen et désignent la mer qui sépare la péninsule de l’archipel comme « la mer de l’Est ». Les Japonais insistent sur le fait qu’elle devrait être appelée « la mer du Japon ».
Le scandale a éclaté suite au triomphe de l’école lors de la finale du tournoi de baseball des lycéens, le « koshien », contre l’établissement Kanto Daiichi de Tokyo, le 23 août dernier, au terme d’un match intense se terminant sur le score de 2 à 1. La victoire a déclenché une vague d’attaques sur les plateformes sociales, avec des demandes d’expulsion du lycée international de Kyoto de la Fédération de baseball des lycéens et des accusations d’être une « honte pour Kyoto ».
Le lycée international est le descendant du Kyoto Chosen, créé en 1947 pour accueillir les enfants d’expatriés coréens. « Chosen » est l’ancien nom de la Corée. Dans les années 1990, face à des problèmes financiers et une chute du nombre d’élèves, l’école a décidé de s’adapter au système éducatif japonais. Avec le soutien du Ministère des Affaires Etrangères sud-coréen et l’Union des résidents coréens au Japon (Mindan), l’école a obtenu l’approbation du Ministère de l’Éducation en 2003, et a changé son nom pour devenir le « lycée international de Kyoto ». Aujourd’hui, 70% de ses 159 élèves sont japonais.
Pourtant, au Japon, on estime que les 600 000 Coréens sont principalement des descendants de migrants qui ont fui la pauvreté ou qui ont été forcés par le régime militariste japonais pendant la colonisation (1910-1945) ; tout ce qui est coréen est fréquemment sujet au racisme.
« Coréens, pendez-vous! »
C’est la Zaitokukai, une organisation qui lutte contre les privilèges spéciaux des Coréens au Japon, fondée en 2006 par le nationaliste Makoto Sakurai, qui a été remarquée dans les années 2010 pour avoir organisé des rassemblements à l’entrée du quartier de Shin-Okubo, à Tokyo, où vit une importante communauté coréenne. On y entendait des slogans tels que « Tuez les Coréens! », ou « Coréens, pendez-vous! Buvez du poison! Crevez! »
La gouverneure de Tokyo, Yuriko Koike, alliée du Parti libéral-démocrate et réélue en juillet pour un troisième mandat, a, comme à chaque année depuis son accession à la mairie de la métropole en 2016, refusé le 1er septembre de rendre hommage aux Coréens – entre 2 900 et 6 600 selon les estimations – tués dans les jours qui ont suivi le séisme du 1er septembre 1923. Dès le lendemain de la tragédie qui a fait 105 000 morts à Tokyo et dans ses environs, des rumeurs ont circulé affirmant que des immigrants coréens avaient empoisonné les puits, allumé des incendies et déclenché des émeutes.
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