Il est courant de mettre en opposition une « France des villages » et une « France des gratte-ciels ». La première, souvent liée à la vie rurale et présumée être un bastion des idées du Rassemblement national, serait le rempart des valeurs immuables d’une nation en proie à la mondialisation et à la « grande substitution ». En revanche, la seconde, constituée de quartiers populaires soi-disant peuplés d’individus majoritairement indisciplinés, contribuerait à cette menace, en raison de la violence urbaine et du « parasitisme ».
Nous rejetons ces stéréotypes. De plus, nous refusons cette stratégie qui vise à fragmenter des territoires dont les problèmes sont plus souvent partagés que différents.
Oui, il y a des défis spécifiques aux régions périurbaines et rurales, comme la dépendance à la voiture – et donc au coût de l’essence – et l’accès aux soins médicaux ainsi qu’aux services publics de qualité. D’après une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees), publiée en mars 2021, pour 100 enfants de moins de 3 ans, il y a en moyenne 8 places en crèche à moins de 15 minutes pour les enfants ruraux contre 26 en milieu urbain.
De plus, ils vivent en moyenne à 25 minutes en voiture d’un pédiatre, contre 7 minutes en milieu urbain. Pour ce qui est des quartiers dits « prioritaires de la ville » (QPV), le plan Borloo pour les banlieues, présenté en avril 2018, soulignait que 40 % d’entre eux n’ont pas de crèche et que leurs résidents « ont deux fois plus de chances de mourir avant 75 ans que les habitants des quartiers les plus riches ».
« Tout est plus difficile »/.
Ces défis ne sont-ils pas similaires ? Ils dépeignent conjointement une France « perdante » dans la mondialisation, dédaignée par certaines élites et qui s’est soulevée avec les « gilets jaunes » en 2018, ou suite au décès de Zyed Benna et Bouna Traoré en 2005. C’est le sous-texte du préambule du rapport Borloo, qui après avoir discuté des obstacles auxquels font face les QPV, ajoute que « lorsque l’on inclut les zones rurales négligées et certaines villes ou régions en grave déclin, ainsi qu’une grande partie de nos territoires d’outre-mer, cela représente plus de dix millions de nos concitoyens qui sont distants du moteur de la réussite ». Il conclut en disant que, « pour cette France, tout est plus difficile ».
Oui, c’est plus difficile ! A Plomelin (Finistère), après la disparition du bureau de poste et de l’une des agences bancaires de la ville, les résidents doivent souvent faire face à des fermetures d’écoles. Dans les quartiers nord de Marseille, moins de la moitié des travailleurs ont un emploi et presque un résident sur deux vit dans une famille pauvre. Dans l’agglomération de Guingamp-Paimpol (Côtes-d’Armor), il y a un manque de médecins et la maternité de l’hôpital est menacée. Dans le 19e arrondissement de Paris, 17 % des ménages sont composés de mères célibataires, contre 12 % en France.
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