En 6e année, Melissia C. n’a pu se rendre à l’école qu’à peine une dizaine de fois. L’état psychiatrique de sa mère, oscillant fréquemment, laissait Melissia et son petit frère souvent seuls. Elle se rappelle comment cela a dégradé leur éducation, la conduisant finalement dans une section SEGPA, qui est destinée aux élèves qui connaissent de grandes difficultés scolaires.
Âgée de 20 ans désormais, Melissia raconte l’instabilité de son enfance. Retirée de sa famille à l’âge de 14 mois et placée sous la responsabilité de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), elle fut plus tard violée par son beau-père à l’âge de 9 ans, suite à une décision d’un juge de la ramener au foyer familial. Elle fut ensuite transférée dans une vingtaine d’endroits différents à travers la France jusqu’à la fin de son suivi par l’ASE à l’âge de 18 ans et trois mois.
Malgré une propension manifeste pour le collège et une passion pour l’écriture, le seul diplôme de Melissia est le brevet des collèges. « Mon histoire n’est que cela, remplie de détachements avec des individus et d’interruptions scolaires », fait-elle le bilan.
Son parcours scolaire résonne avec celui de nombreux enfants qui ont été placés, qui affrontent à leur tour des discontinuités dans leur parcours scolaire et des orientations imposées. C’est ce que souligne une analyse de France Stratégie intitulée « Retisser les fils du destin: parcours des jeunes placés », publiée le mardi 10 septembre. Seulement 12% de ces jeunes réussissent à obtenir un baccalauréat général.
L’analyse des parcours éducatifs et de l’intégration professionnelle des jeunes accueillis par l’ASE a été réalisée en combinant les données d’études statistiques générales et celles de l’enquête ELAP sur la transition vers l’âge adulte. Le panel ne comprend que les enfants nés et ayant effectué toute leur scolarité en France pour des raisons méthodologiques, excluant ainsi les mineurs non accompagnés et ceux venant de l’étranger avec leurs parents. Il est à noter que les données utilisées sont celles de 2015, c’est-à-dire avant que la loi du 7 février 2022 ne prévoie la prolongation de l’accompagnement par les départements jusqu’à 21 ans en l’absence de ressources ou de soutien familial suffisants. Par conséquent, l’éventuel impact de la modification de la loi n’est pas pris en compte.
Un des résultats notables montre un taux de redoublement au primaire particulièrement haut chez les enfants placés sous protection de l’enfance, à 40%, comparé à 16% pour tous les jeunes. Néanmoins, c’est moins que pour ceux vivant dans des familles sans emploi, selon l’étude. À la fin du collège, seuls 43% des jeunes en placement atteignent la 3e année sans retard, contre 71,5% pour l’ensemble des jeunes.
Vous avez encore 48,55% de cet article à consulter. Le reste est réservé aux abonnés.
Laisser un commentaire